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ème année de l’Institut
d’études politiques de Bordeaux, 2000.
MEMOIRE
DE STAGE
sous
la direction de monsieur Hubrecht
*****
Le Plan lumière - Réalisation et enjeux - |
Stage
effectué au service de l’éclairage public et des mises en lumière de la ville
de Bordeaux
sous la
direction de madame Bibes-Froment
|
Je tiens à remercier monsieur
Crombé, Directeur général de la Direction générale de l’aménagement urbain de
la ville de Bordeaux, de m’avoir accueilli au sein de ses services .
Je souhaite également remercier monsieur Dulout, Directeur du service de l’éclairage public et des mises en lumière, ainsi que ses techniciens, messieurs et mesdames les responsables des autres services que j’ai pu rencontrer, MM. Kamlay et Prévôt de l’Office de tourisme de Bordeaux, monsieur le conseiller municipal Jean-Dit-Cazaux chargé des mises en lumière et du patrimoine, de leur aide précieuse.
Enfin,
je remercie tout particulièrement madame Bibes-Froment d’avoir bien voulu
m’accompagner et me guider tout au long de mon passage au sein des services
techniques.
SOMMAIRE .
LA REALISATION DU PLAN LUMIERE DE BORDEAUX : QUELLE AMBITION POUR
QUELLE MOTIVATION ?
Section I : LA NECESSITE DU PLAN
LUMIERE.
A/ La place des mises en lumière.
1. Une importance dans les équipes.
2. Le cadre du Projet urbain pour la mise en place
d’un projet ambitieux.
B/ Le dépassement du strict aspect sécuritaire.
1. Des exemples empruntés ailleurs en France ou en
Europe.
b. L’enjeu d’une redéfinition de la ville
- Dans la structure et la hiérarchie : vers le qualitatif au service de
l’aménagement urbain.
- Dans la qualité visuelle pour la mise en valeur
c. La qualité et les propriétés de l’éclairage
Section II : LES MOYENS MIS EN PLACE POUR LES REALISATIONS
A / Les outils pour la mise en place du Plan
lumière.
1. Le schéma directeur d’aménagement lumière (SDAL).
a. La première partie du SDAL : l’analyse de l’existant
B/ La concrétisation de la mise en place du Plan
lumière.
1. Une réalisation dans un champ large de cohérence.
2. Les critères pris en compte pour la réalisation
du Plan lumière.
3. Le déroulement d’une mise en lumière
Section I : Le Plan lumière
comme ELEMENT symbolique.
A/ La révélation du nouveau maire par une action sur
l’image.
1. La mise en place intéressée du Plan lumière
2. La redécouverte du patrimoine pour rendre la
ville plus agréable et pour séduire les habitants.
3. La reconnaissance de la réussite de la
réhabilitation du patrimoine par la lumière.
Section II : Une véritable politique annexe
A/ La lisibilité et le re-dimensionnement de la
ville.
1. L’aspect nécessaire de l’inscription du Plan
lumière dans d’autres projets de réhabilitation.
a. La réhabilitation de certains quartiers dans un but de ré
appropriation et de requalification.
b. Le cadre de la cohérence du Projet urbain global pour une nouvelle
pratique de la ville.
B/ Le standing et l’embellissement.
1. Vers une politique touristique.
2. L’aspect économique par la recherche
d’investisseurs
3. La reconquête des centres pour l’habitat.
A l’aube de l’an 2000, plus encore
que les autres années, les villes vont se parer avec les fêtes de leurs plus
beaux habits de lumière.
Car en effet, l’éclairage public ne
consiste pas seulement à mettre de la lumière pour éclairer des zones que l’on
trouve trop sombres aujourd’hui. L’arrivée progressive des techniques a permis
de pouvoir progressivement toujours améliorer la qualité de l’éclairage, au
début à l’aide de lampadaires utilisant des becs de gaz, puis s’étant par la
suite modernisée en fonction des apports des nouvelles techniques, comme
l’électricité. Et les techniques encore plus modernes permettent plus que de
mettre en lumière, réaliser une véritable dramaturgie de l’espace. C’est ce qui
fait qu’il a toujours existé un service de l’éclairage public dans les villes
pour pouvoir permettre l’application des nouvelles techniques.
Mais
aussi, le pouvoir de police du maire est concerné par l’éclairage à un titre
essentiel : la sécurité sur la voie publique qui nécessite un bon éclairage de
celle-ci. C’est ce qui justifie la conservation de la compétence en faveur de
C’est à ce titre que Bordeaux, comme
nombre de villes de même taille, ou de taille plus modeste, ont décidé de
mettre en place un plan lumière afin de contribuer à la mise en place d’une
meilleure qualité d’éclairage grâce aux nouveaux procédés, ce qui a nécessité
de repenser la totalité de l’éclairage ainsi que de contribuer à la mise en
place d’un programme de mises en lumière, avec le suivi des services municipaux
et l’inscription dans le Projet urbain.
Ainsi, lors de mon stage au sein des
services techniques de la ville de Bordeaux, j’ai pu apprécier durant un mois
l’action de la municipalité dans la mise en place du Plan lumière. Nous allons
donc essayer de comprendre quelle est l’importance du Plan lumière dans
l’ambition de la réalisation au travers de la motivation des différents
acteurs, avant d’engager une évaluation des apports, et ainsi tenter
d’apprécier si cette politique mise en place relève du symbolique ou si elle
est réellement innovante et positive.
Le Plan lumière de la ville de
Bordeaux coïncide avec la mise en place du Projet urbain pour la ville de
Bordeaux, réalisé en octobre 1996 : global et cohérent, ce dernier intègre
également une dimension liée à l’éclairage public et aux mises en lumière. Ceci
correspond à une nouvelle préoccupation des décideurs publics qui ont compris
la nécessité de considérer un aménagement d’un projet urbain de jour, mais
aussi de nuit, correspondant à la vie des quartiers et à celle de
l’agglomération de Bordeaux.
En effet, si l’éclairage public
dispose déjà des techniques récentes, la volonté de le repenser en intégrant de
nouvelles propriétés et de nouvelles conceptions a justifié la mise en place
d’un Plan lumière, intégré dans le Projet urbain.
Ainsi, si une telle entreprise a
semblé être nécessaire notamment par une certaine prise de conscience des
décideurs publics, elle a pu être mise en œuvre par des outils appropriés
permettant de mettre en place un programme déterminant l’orientation que l’on
veut donner en la matière.
L’opportunité de la mise en place du
Projet urbain ainsi que de l’arrivée de nouvelles ambitions ont permis de
donner un intérêt certain pour la mise en place d’un Plan lumière.
L’élaboration du Plan lumière
s’inscrivant dans la politique générale de la ville de Bordeaux, nous tenterons
donc d’apprécier l’importance de la place accordée au Plan lumière dans le
projet urbain global, ce qui pourra nous permettre de rechercher son origine et
ce qui est attendu de lui.
Il s’agit de comprendre dans quelle
mesure la place des mises en lumière peut s’apprécier tant dans les équipes que
dans la place qui lui est accordée dans la mise en place du Projet urbain, car
l’éclairage public et les mises en lumière s’inscrivent dans la conception de
ce projet urbain, issu de la volonté politique du maire. En effet, la Direction
générale de l’aménagement urbain (DGAU) a été créée dans sa forme actuelle par
le maire trois mois après les élections municipales de mai 1995, et le Projet
urbain a été engagé un an après.
La direction des espaces publics et
des déplacements urbains, c’est-à-dire l’une des quatre sections à composer la
DGAU, a été modifiée dans sa forme avec le changement d’équipe dirigeante, et
est subdivisée en trois services, regroupés au Pôle technique municipal, le service
des espaces verts se situant au Palais de Rohan, c’est-à-dire à l’Hôtel de
ville :
- le
service de la voirie (ou des déplacements urbains et de la programmation)
- le
service des espaces publics (qui lui est nouveau)
- le
service des mises en lumière qui s’ajoute au service de l’éclairage public, et
est composé d’un comptable, d’un ingénieur chef, M. Dulout, de techniciens[2]
ainsi que d’une chargée de mission, madame Bibes-Froment, qui est chargée de
l’aspect esthétique des réalisations, mais aussi du lien avec les élus, le
cabinet, les concepteurs en source, du respect du Schéma directeur
d’aménagement lumière et de donner des idées (comme les petits événements
lumière). C’est donc à ce dernier service que j’ai été affecté à l’occasion de
mon stage.
Par ailleurs le personnel a été renforcé et les équipes ont été structurées de façon à ce que de petites unités travaillent en cohérence avec le projet urbain. Le fait de pouvoir rencontrer les différents acteurs m’a permis de comprendre que le travail se fait en interaction entre les différents services de cette direction, du fait des missions et des objectifs attribués.
Car au-delà, une unité aménagement
urbain permet une réflexion sur l’ensemble de
C’est donc dans ce cadre-là que
travaille l’équipe de M. Dulout. Il est à juste titre le principal acteur
concerné par la mise en place du Plan lumière, même si celui-ci ne concerne
qu’une faible part de son activité, mais son action doit se faire conjointement
avec les différents autres services dans le but de contribuer à la cohérence
souhaitée.
Les missions essentielles qui ont
été confiées à la direction des espaces publics et de l’aménagement urbain sont
ainsi entre autres de développer une politique qualitative des espaces publics
en agissant sur les lieux emblématiques, le mobilier, l’éclairage,
l’embellissement de la ville et sa cohérence, de réussir l’arrivée du tramway
en réorganisant les déplacements urbains ou encore d’améliorer les accès au
centre-ville. Par ailleurs les objectifs poursuivis sont entre autres de
définir et de mettre en place rapidement un traitement global et cohérent des
espaces publics à partir de nouvelles méthodes de travail appliquées sur le
réaménagement des places ou encore de mettre en œuvre le Plan lumière triennal
en optimisant plus encore les opérations de réhabilitation du réseau
d’éclairage public.
Le Plan lumière est donc réalisé
conjointement à d’autres objectifs, et s’inscrit donc à ce titre dans le Projet
urbain de la ville.
Bordeaux aspire donc, au travers
d’un projet urbain global et fort[3],
à tenter de donner une nouvelle image plus représentative de la ville, en
soulignant ses atouts propres correspondant mieux à son ambition et à sa
dimension outre de métropole régionale, de ville d’envergure européenne.
L’ambition qu’elle veut réaliser est donc à son image, mais peut aussi
s’inscrire dans une perspective de “ rivalité ” avec d’autres villes
d’égale importance. De nombreuses mises en lumière ont en effet été très
réussies, comme à Lyon, Paris, Le Mans, Caen, Strasbourg, …
Il existe trois volets dans le
Projet pilote urbain : celui concernant la requalification urbaine, celui sur
la re-dynamisation économique, et celui sur le développement social et
culturel.
Le
Plan lumière s’inscrit dans le premier volet, au même titre que la
ré-appropriation des quais, la recherche programmative pour la reconversion des
hangars au bord des quais, la réhabilitation du quartier des Chartrons, le parc
des Berges, le ravalement et la réhabilitation des immeubles, la réhabilitation
des bassins à flot, etc.
Du Schéma directeur d’aménagement
urbain général, l’on passe donc à des déclinaisons plus sectorielles, comme le
Schéma directeur d’aménagement lumière, sur lequel est conçu le Plan lumière,
afin de cibler au plus juste les décisions à prendre. De la lumière au tramway,
le maillage des axes se superpose pour structurer les forces du développement
urbain à venir. Les différents programmes se font donc conjointement. Ainsi,
dans la dimension du projet urbain, Bordeaux veut mettre en valeur ses
avantages propres tels que la richesse de son patrimoine, mais aussi vitaliser
l’axe Bacalan-Bastide-Belcier, le long des quais, ainsi que l’axe est-ouest,
avec le franchissement du fleuve[4].
Mais ce n’est pas la seule
contribution du Plan lumière au Projet urbain. En effet le Plan lumière est
aussi pris en compte dans la dimension patrimoniale, permettant ainsi de
réhabiliter les lieux liés à l’identité bordelaise. Car il est avéré que
Bordeaux recherche toujours plus la propreté, ou une meilleure gestion de la
proximité. “ Elle doit aujourd’hui
donner l’exemple avec les biens dont elle a la charge ”, comme
l'annonce le maire dans la présentation du Projet urbain, en octobre 1996.
C’est ainsi à ce titre que le Plan lumière a aussi été mis en place, avec
l’inventaire du patrimoine, l’encouragement à la réhabilitation des architectures
traditionnelles, l’aménagement d’espaces publics, la restauration des bâtiments
historiques,... Et ceci d’autant plus que Bordeaux a signé avec le Ministère de
la culture un protocole d’accord pour se placer comme ville de référence
européenne en matière de mise en valeur et de respect du patrimoine, intégrés
aux projets urbains de la cité.
C’est donc dans ce cadre-là qu’entre
la mise en place du Plan lumière : sa dimension semble être à la hauteur des
ambitions de la nouvelle équipe municipale. Il est comme une manière de “ donner à voir ”, il est
comme la plus simple et la moins chère façon de faire comprendre le projet
urbain dans sa totalité, tant sa mise en place se calque sur les atouts de la
métropole régionale, c’est-à-dire le patrimoine et sa nécessaire mise en
valeur, et les axes forts. Son influence se produit au quotidien pour les
habitants mais permet également de séduire les étrangers. Mais aussi la mise en
place du Plan lumière peut se faire sur un temps court, par une action d’incitation,
selon un calendrier envisagé : ainsi il possède sa cohérence propre dans le
cadre du Projet urbain. Par sa réalisation il est donc possible de deviner la
volonté politique et l’envergure que l’on veut donner au Plan lumière
L’ambition des réalisations actuelles est de passer d’une phase d’initiation à une terminaison d’un noyau dur de réalisations. A terme, l’on veut rendre une ville plus lisible, plus conviviale et plus sûre à travers l’éclairage public, mais aussi une ville plus patrimoniale. Révéler et réveiller le patrimoine tant public que privé de la ville afin d’embellir le paysage nocturne, se réapproprier la cité afin de reconquérir une légitime fierté, recomposer la silhouette urbaine de Bordeaux la nuit en tentant de lui conférer le rang de capitale régionale, renouveler un éclairage vieillissant afin d’assurer une certaine animation et mise en valeur nocturne, ce qui constitue une nouvelle priorité, voilà la place du Plan lumière. Les objectifs ambitieux et leur inscription dans le cadre du Projet urbain, l’importance de la tâche à accomplir, et les délais de réalisation assez courts justifient à eux seuls la mise en place du Plan lumière. D’autre part, sa spécificité est de pouvoir s’appuyer sur l’existant, donc sur les avantages absolus qu’il s’agit de valoriser.
Le Plan lumière est un élément qui
permet de faire du Projet urbain un projet complet et participe ainsi à
développer les atouts d’une ville comme Bordeaux. Il permet de jouer sur de
nouvelles fonctionnalités et propriétés attribuées à la lumière, à savoir
considérer que la lumière n’est pas vouée
à un seul intérêt sécuritaire.
Jusqu’au début des années 1980,
l’activité de Bordeaux était essentiellement tournée vers son port. Avec la fin
de l’activité de celui-ci, Bordeaux a dû se tourner vers d’autres activités, à
commencer par la redécouverte d’elle-même. La priorité n’est donc pas de mettre
en valeur de nouvelles infrastructures destinées à un aspect utilitaire, mais
bel et bien de tenter de se re-concentrer sur des avantages propres qu’il
s’agit de redécouvrir ou d’entretenir. Ainsi, a-t-on pris conscience de la
nécessité de restaurer des monuments anciens, de ravaler des façades, mais
aussi la mise en place de l’éclairage entre dans cette finalité-là. Par le Plan
lumière, la nuit pourra être magnifiée par une mise en valeur subtile du
paysage bâti : ainsi les Bordelais et les touristes pourront
(re)-découvrir la ville, son patrimoine, ses espaces publics, son fleuve, tout en
ayant une sécurité garantie. Mais aussi l’on peut dessiner la ville de demain,
que l’on représente axée sur le fleuve. Des réussites remarquables dans
certaines villes ont pu permettre à Bordeaux de voir quelle pourrait être
l’application de telles mesures, et ainsi de voir comment la lumière ne revêt
pas un seul aspect sécuritaire : du seul intérêt de se déplacer la nuit en
sécurité au début, l’on est passé à l’éclairage comme composante importante
dans l’activité sociale, culturelle et économique des collectivités[5].
Le Plan lumière permet donc à la ville non seulement d’être plus belle, mais en
plus d’être plus sûre.
Prioritairement, le service de
l’éclairage public est destiné à offrir la sécurité lors des déplacements de
nuit à
Pour ce qui est de la ville de
Bordeaux, le Plan lumière est une idée du maire, datant de sa campagne
électorale pour les élections municipales de juin 1995. En effet, attaché plus
à la mise en valeur de la ville qu’à la création de nouvelles infrastructures,
et par l ‘intermédiaire d’un effet de mode, il a souhaité mettre en place
un ravalement intensif de bâtiments remarquables, une mise en lumière de
monuments tant religieux que civils, ainsi que la mise en place d’un éclairage
public de qualité: il a donc porté un souci tout particulier à la mise en
valeur nocturne de la ville, et notamment de tous les points remarquables comme
points d’accroche, incontournables pour le visiteur et significatifs pour
“ Par
le Plan lumière que j’ai souhaité, il ne s’agissait pas d’illuminer la ville
pour faire oublier la nuit, mais bien de magnifier la nuit par une lise en
valeur subtile du paysage bâti. Le Plan lumière, c’est la possibilité pour les
Bordelais et les visiteurs de visiter la ville, attentive à la protection du
patrimoine, de ses espaces publics, de son fleuve, l’éclairage public étant
prioritaire dans chaque projet. C’est ainsi pour tous, la garantie d’une plus
grande sécurité, tout en dessinant la ville de demain ”, explique
Alain Juppé.
Par la présentation ainsi faite
par le maire l’on peut constater tout
l’attachement qu’il porte à sa réalisation.
La nécessité de “ remettre à
plat ” l’éclairage public ne pouvait s’accompagner que de la mise en place
d’un programme d’ensemble. L’envergure est de taille, car il existe 25 000
points lumière à Bordeaux.
Il s’agit d’intégrer le fait que la
fonction strictement utilitaire, fonctionnelle ou parcellaire de la lumière,
c’est-à-dire qui ne soit pas vue dans une perspective d’ensemble ou bien due au
hasard, est reléguée au passé des années 1970 : l’éclairage était fonctionnel
et standardisé pour des raisons de maintenance, et essentiellement consacré à
la circulation automobile. Mais bien entendu la fonction sécuritaire reste
présente, sur la voirie ou dans des zones pavillonnaires, et exclusive sur les
seuls grands axes consacrés uniquement aux déplacements automobiles.
Aujourd’hui on accorde une autre
dimension sensible et émotionnelle, pouvant jouer sur la qualité de la vie ou
permettant de donner une certaine atmosphère aux lieux étudiés : l’on s’oriente
vers le piéton, usager de
Afin de pouvoir élaborer ceci, les décideurs publics peuvent utiliser une
méthodologie mise en place par les concepteurs lumière : le Schéma directeur
d’aménagement lumière (ou SDAL), qui s’applique à la ville ou aux sites
intérieurs, jusqu’à la création de mobilier ou de luminaires spécifiques. Ainsi
l’on veut mettre en place une ville nocturne conceptualisée en fonction des
divers projets d’aménagement et non considérée comme un ensemble de points
lumineux, l’idée étant par ailleurs de limiter une cacophonie nocturne due à un
éclairage terne et sans dimension ou encore due à la trop grande quantité
d’enseignes et d’affiches lumineuses tapageuses. Ainsi peut-on aboutir à
recomposer petit à petit une certaine qualité dans la nuit urbaine. En effet,
l’on peut penser avec M. Narboni, concepteur lumière de nombreux SDAL, et qui a
été choisi par la municipalité bordelaise, que “ la lumière est un matériau majeur de l’espace, capable de
modeler et de composer un territoire nocturne générateur de convivialité. Elle
peut créer une dramaturgie de l’espace, permettre de mieux appréhender la
structure historique de la ville pour en recoudre de manière impalpable les
déchirures spatiales encore trop fortement ressenties ”. D’autant plus
que selon lui “ chaque ville, chaque
site a sa propre problématique ”.
Symboliser les axes majeurs,
redécouvrir le fleuve, définir les trajectoires nocturnes autour du tramway,
revitaliser certains quartiers défavorisés ou encore mis dans l’ombre; créer un
effet sur les habitants, qui soit de la fierté ou de la considération, tout
comme sur les touristes et voire les entrepreneurs, voilà qui concrétiserait
réellement l’ambition des concepteurs du Plan lumière bien sûr dans le cadre du
Projet urbain de la ville de Bordeaux. Ceci sera concrétisé par la réalisation d’une trame nocturne de la ville
caractérisée, hiérarchisée et ponctuée d’édifices remarquables, dans une
perspective non mitée. Ainsi la lumière pourra
a sa façon redessiner la ville en jouant sur des potentialités à développer,
sur la vitalisation des atouts ainsi que par des mises en perspective. L’artistique doit donc s’allier à l’aspect
technique pour que la magie s’opère pleinement. La composition du service
des mises en lumière de la ville de Bordeaux témoigne donc de ceci.
Si Bordeaux veut sortir de sa
léthargie, de sa réputation de “ belle
endormie ”, peut-être que l’élaboration d’un Plan lumière permettra de
suffire à
Selon M. Dulout, en règle générale,
l’on cherche à embellir par les mises en lumière, en commençant par ce qui est
le plus notable, à savoir par les bâtiments publics, car par ailleurs le fait
de trop tarder dans les réalisations pour ce domaine-là peut conduire à un
certain blocage. D’ailleurs, le Plan lumière s’est développé essentiellement
dans sa dimension patrimoniale. La lumière est ainsi considérée comme un
véritable outil de mise en scène. L’on peut même parler de scénographie, par la possibilité de faire ressortir les éléments
remarquables tout en dissimulant dans l’ombre les éléments moins valorisants :
tout se fait donc en mesure de l’éclairage, de la colorimétrie, ou des jeux
d’ombres et de lumière. Et dans un niveau plus global il convient de respecter
des règles générales afin de permettre d’assurer une certaine cohérence,
notamment dans l’ancienneté ou le style de l’édifice. L’éclairage peut donc
contribuer à faire redécouvrir des bâtiments pouvant être sans intérêt le jour,
et à créer des paysages nocturnes pouvant rendre la ville agréable dans son
aspect nocturne, à l’image de Barcelone. Mais il faut toutefois éviter de
tomber dans un excès d’éclairage : trop illuminer peut en effet effacer les
effets de
Le Plan lumière relève bien d’un
double aspect : la dimension éclairage public comme dépassant le strict aspect
sécuritaire et un aspect patrimonial permettant de mettre en valeur les aspects
architecturaux remarquables ou anecdotiques, et donc de véritablement faire “ parler ”
les pierres. Et dans sa globalité la
ville doit devenir selon les propos mêmes de M. Crombé “ plus lisible, plus conviviale, plus sûre, plus
patrimoniale ”.
L’éclairage doit permettre de
remodeler le paysage urbain en fonction d’exigences nocturnes qui peuvent tout
à fait être différentes de celles diurnes. Il ne s’agit pas de faire une
restitution fidèle des paysages urbains, mais au contraire de disposer d’un
moyen d’effectuer un renouvellement périodique de l’espace, et donc de
contribuer à son enrichissement[6].
Ainsi, l’éclairage, ramené trop
souvent à un outil de sécurité, constitue de par ses qualités spatiales le
support indispensable à la création d’ambiances nocturnes qui sans lui
disparaîtraient. Ainsi, un nouveau paysage doit contribuer à la création d’un
nouvel espace enrichissant la structure de la ville : l’éclairage doit donc
améliorer l’approche de la cité en mettant en évidence la richesse de son tissu
urbain. Par une succession de lieux différemment éclairés, par des éclairages
diffus et ponctuels, par des couleurs différentes se matérialise la structure
de la ville, en faisant ressortir les lieux monumentaux et les perspectives,
les points hauts ou bas et allant jusqu’à pouvoir dessiner les caractères
différents de certains quartiers.
Au niveau d’un aménagement ponctuel,
l’éclairage, s’il doit assurer un niveau de visibilité suffisant au
développement des activités, contribue aussi à la définition de cet espace et à
la création d’ambiances nocturnes particulières. En jouant sur la couleur et
l’intensité des sources lumineuses, sur la hauteur et la disposition des
supports, en déterminant les surfaces éclairées, on peut souligner ou remettre
en cause les qualités diurnes d’un espace. Ainsi certains lieux ou monuments qui semblent sans intérêt le
jour revêtent une dimension plus importante
L’éclairage public relaie la lumière
du jour afin de maintenir un niveau de sécurité suffisant: ainsi entre en jeu
l’importance du niveau de luminance, de son uniformité (par le problème des
zones d’ombre par exemple), la limitation de l’éblouissement ou le guidage
visuel tant des automobilistes que des piétons.
En matière de mobilier urbain, le matériel d’éclairage est constitué de luminaires ainsi que d’un support, devant assurer la résistance mécanique de l’ensemble. Outre le fait de remplir ses fonctions, il faut une intégration dans l’espace ou l’environnement, à savoir que le mobilier doit s’intégrer à d’autres mobiliers urbains, et doit donc éviter de surcharger le paysage urbain. De même, il faut éviter les accumulations de supports ou l’encombrement dans les cheminements. Aussi, il peut permettre par exemple de supporter des éléments publicitaires intégrés dans le paysage urbain. Mais également l’on doit bien entendu prendre en considération les spécificités propres de la ville de Bordeaux en utilisant des candélabres traditionnels et historiques que l’on cherche à réhabiliter (comme les lanternes de cuivre situées dans l’axe médian de nombreuses rues des quartiers historiques de Bordeaux).
Mais aussi il existe une position
normale ainsi qu’une position de veille dans l’éclairage de veille que pour
l’illumination des bâtiments : on peut ainsi moduler ou interrompre
l’éclairage, notamment par des soucis d’économie d’énergie. Ceci s’applique
dans la plupart des projets de mise en lumière.
Un effort de maintenance est
également à réaliser afin de prévenir les éventuelles difficultés : il s’agit
avant tout d’un travail du quotidien passant par du “ relamping ” et
de l’entretien, mais les nouvelles techniques doivent permettre de rendre la
maintenance plus affinée et limitée, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’un
contrôle par ordinateur en plus des signalements.
L’intérêt pour effectuer des mises
en lumière et pour renouveler l’éclairage public est important au vu de
l’intérêt porté par la municipalité, mais il s’agit de comprendre quelle est
l’ampleur des moyens permettant de remplir les objectifs.
Ceci
peut être révélé tant par les outils préalables à la mise en place du Plan
lumière que par la réalisation concrète.
Le maire de Bordeaux Alain Juppé a
souhaité l’établissement d’un schéma directeur d’aménagement lumière avec une
consultation auprès de concepteurs lumière, consultation remportée par Roger Narboni et son agence Concepto, afin de faire une étude. Il a été
établi en 1996 et présenté au comité de pilotage présidé par le premier
adjoint, sous la direction de Me Jean-dit-Cazaux, conseiller municipal délégué.
M. Crombé, directeur général de la DGAU urbanisme, architecture, déplacements,
mises en lumière et éclairage public, en assure le suivi et la gestion.
L’idée est que chaque idée maîtresse
engendre des propositions lumière ou des orientations, de manière à composer un
paysage et une morphologie nocturnes, et redonner ainsi à Bordeaux un impact
fort et affirmé
Concrètement, l’agence, après des
contacts et des échanges de vue sur la ville de Bordeaux, et sa stratégie de
développement urbain, sur les projets urbains architecturaux en cours d’étude,
a opéré la mise en place de la faisabilité qui s’est déroulée en trois étapes
sur une période d’environ six mois.
Il est établi avec au préalable une analyse des aménagements diurne et nocturne existants, mais aussi de la ville.
On cherche alors à prendre connaissance de la ville dans tout ce qui fait son identité, mais aussi des axes perceptifs tout comme des points remarquables, des projets urbains (infrastructures, transports,...), des fonctions, des compositions urbaines, de l’environnement nocturne et lumineux qui existent. Ainsi établit-on un diagnostic qualitatif et une analyse de l’impact des propositions d’éclairage pour l’image nocturne du site. Il obéit bien sûr aux conditions en matière de règles locales d’urbanisme quant à sa mise en place (sous l’étiquette de planification urbaine, les règles locales d’urbanisme comprennent les schémas directeurs et les plans d’occupation des sols).
Ainsi peut-on préparer et coordonner
le cadre de futurs projets selon quatre lignes directrices :
-
les principes synoptiques et les six idées maîtresses
(projeter la nuit la structure historique
et l’évolution de la ville; guider les visiteurs en signalant accès, entrées et
portes de la ville; densifier l’image nocturne dans la ceinture des cours;
affirmer la présence de la Garonne et l’importance des deux rives bordelaises;
souligner le patrimoine et les détails architecturaux remarquables, créer un
système de “ nodules lumière ” dans les quartiers),
-
la composition nocturne des sites,
-
l’éclairage des espaces publics,
-
l’éclairage des architectures.
Le SDAL permet ainsi de faire une
vision du général au particulier et établit une réflexion sur la ville dans
l’espace public. C’est donc le document de référence pour définir la politique
de mise en lumière de la ville, les règles communes qui devront être prises en
compte par les concepteurs. Ces règles minimales doivent permettre de rendre
harmonieux le paysage nocturne bordelais, ce qui n’empêche pas pour autant
l’imagination des concepteurs pour l’enrichir, certes dans le respect de
certaines règles minimales, “ car
Bordeaux doit avoir, à l’échelle des promeneurs, des images nocturnes
multiples, vivantes et diversifiées ”. L’outil qu’est le SDAL peut
s’enrichir par la suite des différents apports des différents concepteurs, par
concours sur certains sites.
Le SDAL peut donc apporter une autre
culture de l’aménagement, en complétant la panoplie des outils mis aujourd’hui
à la disposition des élus, comme le schéma directeur d’aménagement urbain, le
projet de ville, le plan d’occupation des sols, le plan de déplacement, le
schéma des transports urbains, le schéma piétonnier,... Voici sa présentation
en deux parties.
Mettre en œuvre une “ stratégie nocturne globale pour
développer progressivement à Bordeaux un éclairage urbain de qualité et une
image nocturne novatrice et attractive à la hauteur des ambitions
affichées ” : voilà le souhait exprimé par la municipalité pour mettre
en place le Schéma directeur d’aménagement lumière, préalable au Plan lumière
dans le cadre du Projet urbain.
L’analyse de l’existant repose sur
les éléments suivants : la structure
urbaine, les deux rives, l’évolution urbaine, les illuminations, le mobilier de
style, les ambiances nocturnes, les tonalités de lumière. Elle nous
renseigne sur la découverte lointaine ainsi que sur l’accès à
Aussi doit-on bien identifier
l’architecture de la ville issue des différents développements historiques : le
Bordeaux médiéval, le Bordeaux du XVIIIème siècle et le Bordeaux des
grands ensembles du XXème siècle.
Egalement a été fait l’inventaire
des édifices publics ainsi que des architectures remarquables A ce titre, il
est intéressant de noter que Bordeaux a le secteur sauvegardé le plus grand de
France (il correspond à la partie historique de la ville où les conditions en
matière d’urbanisme sont les plus strictes). Ainsi la ville qui a résisté à
l’épreuve du temps tout comme à celle des grands conflits, ce qui est loin
d’être de cas de nombreuses villes françaises, est riche en monuments,
bâtiments et façades remarquables ainsi qu'en parcs et jardins, et
répertoriables en fonction des diverses époques du développement de
Pour ce qui est des quartiers, de
très fortes identités se dégagent, issues de leurs différentes spécificités,
diversités et richesses. Car la vision de la ville peut se faire également au
travers des différents quartiers que sont par exemple Caudéran, Bacalan, la
Bastide, Belcier, Saint-Pierre ou Saint-Michel.
L’environnement lumineux existant
est également analysé. Il nous est montré que la ville de Bordeaux est
relativement sombre, c’est-à-dire que les reliefs dans les éclairages lumineux
sont très effacés. Quelques grands édifices se détachent de cet ensemble, alors
que la Garonne reste comme une zone de rejet, constituant ainsi une masse
noire. A propos de l’éclairage urbain, il existe une certaine diversité,
surtout en fonction des excroissances dans la composition de la ville (comme la
zone du lac) ; les boulevards ont par ailleurs un mobilier de type autoroutier,
peu esthétique et assurant la fonction minimale sécuritaire. Vers la zone de la
place des Quinconces un renouvellement partiel a été opéré, ce qui crée une
certaine cacophonie tant pour les lampes que pour les mobiliers.
Pour ce qui est des illuminations et
événements lumineux un inventaire de l’illumination des monuments bordelais
montre que certains sont très illuminés, même trop, d’autres sont sombres,
d’autres encore n’ont qu’un éclairage disparate. Ainsi voit-on apparaître un
phénomène de “ mitage ”, beaucoup d’éléments semblant relever du hasard
des assemblages ou des rénovations (c’est-à-dire en faisant des interventions
particulières non pensées dans la cohérence globale), et qui est en voie de
régulation.
Le patrimoine du mobilier
d’éclairage bordelais a été qualifié de très intéressant, de riche. Peu de
zones en effet sont d’un style contemporain pouvant ne pas être dans le même
ton avec l’image et le caractère de
L’ambition
pour la vie nocturne bordelaise est essentiellement de projeter la nuit la structure et l’évolution de la ville, de guider les
visiteurs, de densifier l’image nocturne dans la ceinture des cours, de
réaffirmer la Garonne et la rive gauche, de souligner le patrimoine (par des
parcours de nuit, etc.), de mettre en place un système de “ nodules
lumière ”dans les quartiers, ce qui correspond aux six idées
maîtresses. L’on cherche à mettre en place une véritable politique d’urbanisme
lumière pour assurer un éclairage urbain de qualité tout comme des mises en
lumière de bâtiments. Ce n’est qu’après que sont définies des spécifications
ainsi qu’un cahier des charges.
Tout d'abord, pour ce qui est de la
morphologie nocturne, l’ambition est de donner à percevoir la structure et
l’évolution urbaine, ainsi qu’une plus grande compréhension de son évolution
historique, par le choix de certaines tonalités d’éclairage, le site de
Bordeaux étant structuré par la boucle de
Pour ce qui est de l’éclairage
urbain, les préoccupations se portent sur les tonalités de lumière, sur les
typologies d’éclairage (à savoir permettre d’attribuer un type d’éclairage
précis correspondant à un type de voie particulier), sur les vélums lumineux ou
encore sur les intensités lumineuses. La préoccupation se fait donc
essentiellement au niveau de la voirie.
Pour ce qui est de la composition
nocturne, une attention particulière est portée sur les axes et lieux-clé qui
constituent non seulement des repères mais aussi et surtout des lieux de vie et
de rencontre, symboles des quartiers (boulevards, cours, quais, axes
historiques, places du centre ville ou des quartiers et “ agrafes ”).
Mais aussi il est porté attention sur l’éclairage paysager (pour souligner une
“ banane verte ” et rehausser certains grands vides nocturnes),
l’éclairage aquatique (pour visualiser un “ serpent bleu ”entre la
Garonne, les bassins à flots et le Lac), les points focaux et les perspectives
à privilégier, ainsi que sur le patrimoine architectural (au travers des
édifices et éléments visibles dans la silhouette nocturne de la rive gauche,
des évènements lumineux, des édifices liés aux nodules lumière dans les
quartiers. On met ainsi l’accent sur la typologie d’éclairage, la tonalité de
lumière ou le mobilier. Le fait de valoriser l’éclairage nocturne va pouvoir
permettre de créer un appel visuel.
A propos de la silhouette nocturne,
celle-ci se découvre surtout depuis la Garonne, avec les points hauts. Il est
proposé de réinventer deux nouveaux ordres superposés pour les façades des
quais, avec l’image nocturne des cours et différentes rues transversales. Et la
mise en évidence des parties visibles du patrimoine historique pourra être
révélée au niveau du regard du piéton, et aussi des rehauts lumineux pour
souligner des détails architecturaux remarquables visibles par les promeneurs.
Le patrimoine
architectural et les illuminations des édifices et des détails architecturaux
sont aussi des éléments sur lesquels le Schéma directeur d’aménagement lumière
porte son attention, en plus de
Enfin, une attention a été portée à l’éclairage dans les
quartiers, avec l’intérêt de créer des nodules de lumière et des liaisons inter
quartiers.
L’éclairage se fait donc aux endroits et selon les axes
stratégiques correspondant aux lieux de vie et lieux de prestige ou
d’importance (c’est-à-dire incontournables ou ayant des monuments prestigieux).
Ainsi, a-t-on mis en place les bases pour mettre en place le Plan lumière en
fonction du patrimoine, de l’historicité, de l’identité de Bordeaux, ce qui
constitue sûrement une nouvelle préoccupation.
Plus concret, il établit une liste de réalisations par voies,
places, sites, espaces verts, ouvrages d’art, monuments, …mais aussi un
calendrier basé sur une proposition de planification annuelle des
investissements, une hiérarchisation des espaces et des priorités, ainsi que
des axes visuels et perspectifs à privilégier. C’est de lui que l’on parle le plus
lorsque l’on parle de Plan lumière mais en fait il n’est qu’une étape du
processus de mise en place des nouvelles réalisations.
Le Plan lumière revêt un aspect plus patrimonial se référant
à des édifices connus. C’est l’outil qui se distingue le plus (environ 20 mises
en lumière ont été effectuées jusqu’à fin juin 1999), même si le calendrier ne
peut être tenu correctement : ainsi l’on n’a pu suivre la programmation
possible établie par manque de budget. L’on évolue donc en fonction de
priorités établies par ailleurs.
Le Plan lumière est donc comme une accroche avec une identité
particulière, et est un élément de plus pour signifier ou annoncer d’autres
éléments, comme le parcours patrimonial. Mais il est aussi lié avec le mobilier
urbain, que l’on cherche à harmoniser dans les couleurs (bleu réal) afin
d’assurer une certaine esthétique dans la ville.
Elle se veut comme le complément
technique du SDAL, car “ elle
institue et résume, en fonction des typologies d’espace des principes d’éclairage
qui découlent des orientations fondamentales exprimées dans le SDAL ”.
Elle est complétée par des fiches typologiques préalables à la réalisation sur
le terrain.
La charte lumière établit des prescriptions ainsi qu’un cahier des charges pour le mobilier lumière, la signalétique ou encore la temporalité des éclairages. Elle traite de la colorimétrie ainsi que de la cohérence dans le matériel lui-même.
Ainsi, elle poursuit un but
simplement indicatif, car chaque site doit être mise en place une étude précise
est réalisée individuellement et postérieurement pour mettre en place un
véritable projet d’éclairage. L’intérêt de la Charte lumière est d’aider les
services et les concepteurs dans les projets d’éclairage ainsi que de permettre
la réflexion sur le mobilier tout comme de porter des indications sur le
traitement lumineux.
Sa présentation se fait sur les
thématiques suivantes : l’agglomération et la ville (où l’on porte des
réflexions quant à l’entrée de la ville et aux pénétrantes que l’on cherche à
valoriser), le centre-ville, le centre historique, les quais (avec
l’aménagement de la rive gauche en fonction du projet urbain), les parcs et les
espaces verts (l’ambition est de “ rehausser les grands vides
nocturnes ”), l’eau (on veut permettre la découverte du fleuve la nuit
ainsi que dessiner une trame aquatique), le patrimoine architectural (avec une
mise en valeur au niveau du regard du piéton ainsi qu’une réflexion sur les
édifices civils).
“ L’éclairage
des détails architecturaux ne doit pas devenir lui-même un postiche de style;
il doit a contrario permettre de développer un regard sensible du citadin sur
la mémoire architecturale bordelaise, pour encourager découvertes et promenades
nocturnes ” : les monuments à éclairer pour une mise en valeur
nocturne des quartiers obéissent donc à cette logique.
Ce n’est qu’une fois que ces
documents sont conçus qu’il est possible de concrétiser la mise en place du
Plan lumière. En effet, le Plan lumière et la Charte lumière régulent des
spécifications de manière à mettre en place, au fil des années, en fonction des
actions qui seront menées, et des investissements décidés, une véritable
politique d’urbanisme lumière, après des appels à candidature et concours.
C’est ainsi que des règles communes sont définies, et seront prises en compte
par les différents concepteurs appelés à concevoir des illuminations, pour
orchestrer et rendre harmonieux l’ensemble du paysage nocturne bordelais.
Pour ce qui est de la
concrétisation, il semble de plus en plus nécessaire de prendre en compte non
seulement ce qui relève de l’éclairage, mais aussi des autres éléments : on ne
saurait concevoir une vision particulariste comme elle a pu être par le passé,
pour avoir une vision globale de l’aspect de la ville de demain. Il faut donc
une organisation ainsi qu’une conciliation en associant les différents services
techniques.
Ainsi, et nous l’avons vu plus haut,
le Plan lumière, même si sa mise en place concerne de nombreux acteurs, relève
spécifiquement du service des mises en lumière, ce qui crée une plus grande
facilité de travail.
Les dossiers
sont répartis par agent. Au départ, la répartition se fait en fonction des
tâches mais très vite a été rendue nécessaire la nécessité de polyvalence.
L’éclairage relevant de la voirie, sa réalisation s’identifie donc à un projet
de voirie, réalisé par
Ainsi
voit-on la nécessité de penser la totalité, entre le mobilier destiné à
l’éclairage, les panneaux de signalisation, les Abribus, les arbres, les places
de stationnement. Aussi faut-il tenir compte de soucis pratiques, comme par
exemple les facilités destinées aux handicapés. Ces critères sont de plus en
plus importants, notamment pour ce qui est par exemple de la sensibilité à
l’esthétique lors de la disposition des éléments : il existe à ce titre une
commission du mobilier urbain, informelle, et donnant un avis technique, mais
en fait le choix se fait en fonction d’une charte, afin d’éviter les trop importantes
disparités. Madame Bibes-Froment joue un rôle important et nécessaire en la
matière, s’inspirant d’éléments historiques, de catalogues, de modèles
importés,... Car si l’éclairage a évidemment des implications pour la nuit, il
est nécessaire de voir que les lieux vivent le jour également, avec toutes les
incidences que peut causer la disposition du mobilier urbain.
Il doit ainsi exister une concertation avec les autres services pour penser le projet de façon plus large. Mais aussi il s’agit pour ce qui est du patrimoine de contribuer à la meilleure réhabilitation possible : certes, le ravalement est possible, mais également il s’agit de restructurer les espaces environnants, en supprimant un parking par exemple, ce qui fut le cas pour la Place de la Bourse, ou en effectuant un nettoyage systématique des tags.
Tout d’abord, les grandes directives
prises par le maire, avec la collaboration de l’adjoint à l’urbanisme, à
l’architecture et aux bâtiments architecturaux, M. Lavroff, et du conseiller
municipal aux bibliothèques municipales, au patrimoine historique, au Plan
lumière et au mobilier urbain, M. Jean-dit-Cazaux. Ce dernier m’a d’ailleurs
précisé que le travail ne se fait pas dans l’urgence, mais dans la pérennité,
en prenant des précautions, dans la concertation avec le pôle technique
municipal, et en prenant le temps d’écouter la population, le maire étant
largement favorable pour l’écoute d’associations.
Ainsi a-t-on pu établir le calendrier[10],
en fonction de tous ces éléments et de toutes ces rencontres.
Les illuminations tant des monuments
que des voies obéissent à un calendrier précis quant à leur réalisation, et
correspondant au Plan lumière, si toutefois l’on peut suivre fidèlement ce
calendrier. Mais aussi des exigences sont communes avec les domaines des
espaces publics et des espaces verts, de même pour la voirie (gérée par la
CUB). Ceci semble un peu complexe à mettre en place, donc un peu long à
réaliser. Ainsi, la constatation du déroulement du Plan lumière dans l’aspect
voirie s’établit sur un temps assez long.
Pour ce qui est des mises en
lumière, on effectue une priorité pour les sites classés avec une possibilité
de ravalement ou de réparation pour les sites les plus notables : la
constatation de l’évolution de la mise en place du Plan lumière concernant
l’aspect des mises en lumière est donc plus rapide que pour l’aspect voirie.
Pour l’établissement d’une mise en lumière, en prenant les exemples de
Pour les
monuments emblématiques du patrimoine bordelais, on procède donc également à
une opération de ravalement souhaitable, en plus de la mise en lumière.
L’éclairage public environnemental est modulable en fonction de l’optimisation
que l’on veut donner au projet. Pour ce qui est des opérations effectuées dans
le cadre du secteur sauvegardé, on effectue les opération sous le contrôle
obligatoire de l’Architecte des Bâtiments de France et de la DRAC (direction régionale
aux affaires culturelles), dans le but de respecter le plus possible les
bâtiments et édifices remarquables : ainsi un soin tout particulier est apporté
à l’encastrement des sources de lumière ainsi qu’au fait d’éviter les
éblouissements qui ont peu la faveur des habitants.
La question
des bâtiments privés est assez difficile, car il n’est pas possible de financer
des installation privées pourtant intéressantes à valoriser. A défaut il est
possible de mettre en place un système d’incitations comme à Lyon, les
particuliers effectuant les investissements concernant les installations, et la
ville s’engageant à payer les consommations. Ainsi existe-t-il un problème pour
l’un des bâtiments les plus imposants de Bordeaux, comme
Il existe deux aspects du travail du service [12]:
-
ce qui relève des projets, passant par les études, les
appels d’offre (pour les concepteurs et pour la consultation d’entreprises),
-
ce qui relève de l’éclairage, incluant le suivi des
chantiers.
Il existe également deux façons de
hiérarchiser les sites selon leur importance, tant pour les places que pour les
bâtiments : ainsi met-on en œuvre un traitement direct, ou une maîtrise d’œuvre
pour les réalisations les plus intéressantes.
Après avoir décidé des projets que l’on veut réaliser, l’on met en recherche des concepteurs[13] que l’on choisit après appel à candidatures pour leurs compétences. Cinq candidats sont choisis sur l’ensemble des dossiers.
Ensuite en comité technique
l’on analyse selon les critères de
Cela prend vingt semaines en aller et retour d’analyse
de dossier pour savoir celui qui a été finalement retenu, avec un avant-projet
sommaire, puis un avant projet définitif, et enfin un appel d’offre à
entreprises[14]
(avec consultation afin de déterminer au mieux la compétence et le prix).
Puis enfin intervient la phase des travaux proprement
dite, pour une durée avoisinant deux mois. Puis sont réalisés des essais et des
réglages des couleurs ou des intensités, avec l’avis critique des différents
décideurs, à commencer par le maire, ce qui permet de valider concrètement le
choix. Enfin s’effectuent les mises en lumière définitives, pour les plus
emblématiques avec une inauguration. Le temps total des réalisations varie
entre six et huit mois en général, un peu plus pour les réalisations plus importantes
(si l’on désire aussi procéder à un ravalement : ainsi le fait qu’un bâtiment
soit plus important fait qu’il est mieux traité, ce qui peut nécessiter deux
années, comme pour le Grand Théâtre.
Successivement, la mise en place petit à petit des mises
en lumière permettra de constater l’envergure du déploiement du Plan lumière et
ainsi de voir établi tout un ensemble de réalisations.
Mais il semble que le déroulement des travaux tende à rencontrer certaines difficultés, l’éclairement des voies tardant un peu à cause du choix de l’objet mât par les élus et le maire dans les zones où les support n’ont pas d’intérêt patrimonial ou historique, et les mises en lumière rencontrant parfois quelques problèmes que l’on n’aurait pu envisager avant la phase active des réalisations[15].
Il existe une nature différente
entre la mise en lumière et la requalification lumineuse de voies. Il est ainsi
avéré qu’il est plus aisé de travailler sur la voirie, car les mises en lumière
étaient jugées secondaires auparavant, donc rares. Il est donc avant tout une
question d’opportunité de travailler sur les mises en lumière car c’est par
elles que l’on se rend compte le plus de la mise en place effective du Plan
lumière, encore faut-il définir les priorités en matière de mises en lumière,
que ce soit au niveau géographique ou au niveau de l’intérêt.
Il existe une aussi une distinction
importante qui est opérée entre le patrimoine historique et le patrimoine
moderne quant au traitement, notamment pour ce qui est de la place accordée à
l’originalité. Toutefois, chaque cas est particulier. Ainsi doit-on tenir
compte des points communs architecturaux ou géographiques pour garder une
certaine cohérence.
Mais aussi il est possible de
pouvoir bénéficier de subventions pour la réalisation des mises en lumière. Ces
subventions arrivent à la ville, non au service de l’éclairage. C’est ainsi que
la part du budget alloué au Plan lumière peut évoluer par décision du maire.
Mais toutefois la même somme a été allouée dès l’origine, sans évolution.
Concrètement, pour ce qui est de l’aspect du financement, une aide est accordée par l’Europe dans le cadre des FEDER pour certaines réalisations, mais aussi un financement de l’Etat complète les subventions. Le financement se fait de façon à peu près équilibrée entre l’Europe, l’Etat et la ville lorsque les fonds européens sont attribués, sinon le financement se fait à 60% par la commune et à 40% par l’Etat (par le biais de la DATAR, du fait du protocole d’accord avec le ministère de la culture). Il existe aussi des opérations qui sont intégralement financées par la commune, donc sans participation de l’Etat.
L’intervention de l’Etat se fait à
hauteur de quatre millions de francs sur cinq ans, et l’Europe à hauteur de un
million de francs sur quatre projets.
Ainsi, il existe un certain nombre
de problèmes pour ce qui est de la confrontation des réalisations aux
objectifs. Le budget alloué, limité à quatre millions de francs annuels,
ne permet pas de suivre fidèlement le calendrier du Plan lumière.. En effet,
les décisions sont parfois longues à mettre en place, du fait de difficultés
budgétaires. En effet, le budget accordé est de 4 millions de francs par an, ce
qui est peu. Ainsi, la réalisation de la mise en lumière du Grand Théâtre a
duré deux ans, pour un coût de 2,7 millions de francs. Certes, il s’agit de la
réalisation la plus onéreuse, et elle occupe plus de la moitié des crédits
alloués.
Mineur au début, l’intérêt pour la lumière a été croissant,
une étude et des projets ont été mis en place. Il s’agit toutefois de
comprendre si les apports que le Plan lumière peuvent apporter à la ville de
Bordeaux sont symboliques ou véritables.
Le Plan lumière va progressivement
prendre forme, en fonction des priorités établies. C’est ainsi que sa
réalisation relativement rapide dans un élément valorisé qui est le patrimoine
pourra assimiler mises en lumière comme ayant un aspect promotionnel et redécouverte de la ville à une politique
symbolique. Mais toutefois, il s’avère que le Plan lumière constitue malgré
tout une véritable politique annexe, donc s’inscrivant dans le cadre d’autres
réalisations.
Décidé “ à faire ses
preuves ”, le maire a relancé un certain nombre de dossiers comme
l’aménagement des deux rives ou le tramway, remplaçant le projet de métro
abandonné. Mais aussi il a lancé le Plan lumière pour les monuments, le
ravalement des façades, l’embellissement des places, la requalification de la
voirie, ou encore pour l’amélioration de la propreté, prenant conscience de la
valeur touristique de la ville mais aussi du formidable outil de communication
que le Plan lumière peut lui procurer. “ Bordeaux
était appelée la ‘belle endormie’. Belle, elle l’est de plus en plus. Endormie,
elle ne l’est plus du tout ”, se félicite Alain Juppé[16].
Et sachant qu’il a été élu pour “ rattraper
le temps perdu ”, le maire ne se prive pas de montrer aux Bordelais
eux-mêmes une nouvelle représentation de leur ville.
Que
ce soit pour l’ambiance, pour l’image que d’ailleurs l’on sur-valorise, pour
dessiner la ville de demain, le Plan lumière montre une certaine efficacité
quant à une véritable remise en marche de la ville, en attendant les véritables
réalisations en terme d’infrastructures : ceci est la considération du défi du
point de vue des décideurs en terme de notoriété et d’image. Bordeaux veut donc
aspirer avant tout à une image de ville où il fait bon vivre (et elle est en
cela très bien classée parmi l’ensemble des villes françaises du fait de sa
progression), avant d’être une ville pratique ; la reconquête passe donc avant
tout par le patrimoine : ceci est le point de vue des personnes pour qui sont
destinées les nouvelles réalisations, à savoir
La révélation de la gestion de la politique de la ville semble pouvoir être vue de façon symbolique par le fait qu’elle semble montrer que sa mise en place se fait de façon intéressée, mais peut aussi être un moyen pour faire constater la mise en œuvre concrète du Projet urbain à défaut de pouvoir mettre en place les chantiers les plus importants. Le principal caractère mis en place dans cette politique est de recycler les bâtiments anciens, de réutiliser les espaces centraux délaissés, et non plus de consommer les espaces libres, comme F. Cuillier, directeur de l’agence d’urbanisme, l’a évoqué.[17]
Ainsi, l’objet, comme le dit le
maire lui-même dans la présentation du Projet urbain, est de faire en sorte que
l’effort entrepris soit “ à la fois
symbolique et représentatif de ce que nous allons faire pour la ville ”.
L’hebdomadaire L’Express daté
du 5 mai 1999, dans son article “ Bordeaux,
objectif 2001, Juppé en quête de pouvoir ”, date correspondant à la
prochaine échéance municipale, a publié: “ Qu’a
fait le maire pour impressionner les Bordelais, toujours très sensibles à ce
qu’ils peuvent voir? L’illumination des façades de la vieille ville ? Très
beau, très réussi. Comment n’y avait-t-on pas pensé plus tôt ? ”. Le
journaliste a par ailleurs rajouté, à propos des Bordelais: “ Chaban, lui, les faisait
rêver ”. Alain Juppé a donc voulu séduire les Bordelais : le Plan
lumière semble-t-il est un moyen direct pour redécouvrir la ville, mais aussi
pour apprécier leur nouveau maire durant ce premier mandat.
En effet, l’endettement de la ville
et la redécouverte du patrimoine ont été des données pour le nouveau maire
ayant la lourde tâche de succéder à Jacques Chaban-Delmas. N’étant pas
originaire de la ville ou de la région bordelaise, n’ayant pas eu de fonctions
dans l’entourage de l’ancien maire, Alain Juppé avait besoin d’un symbole fort
par rapport à ses ambitions en témoignant de sa reconnaissance et en effectuant
son action. Ainsi a-t-il mis en place le projet urbain, avec pour principales
préoccupations la mise en place du tramway et le franchissement de la Garonne[18].
Or, ces investissements que nous
avons identifiés sont très lourds à mettre ne place, nécessitent beaucoup de
temps, tardent à se concrétiser et ne créent pas forcément un consensus dans
Pour
le maire, le Plan lumière n’est que l’un des éléments dans lesquels Bordeaux
s’investit. La question au début était celle du franchissement de la Garonne et
la revalorisation des quais comme objectif prioritaire, mais les deux ambitions
ont été rendues connexes, par les illuminations de certains lieux autour du
fleuve. La réalisation du Plan lumière étant plus rapide à mettre en place,
c’est tout naturellement sur celui-ci que se portent les efforts. Avant, il n’y
avait pas de mises en lumière du fait qu’il n’y avait pas de volonté politique,
ainsi qu’une question financière, la priorité étant donnée aux grands
investissements. Mais l’affirmation du fait de vouloir s’investir dans le Plan
lumière traduit le symbole de la mise en place du Projet urbain. La lumière,
dont les conséquences culturelles sont à la mode, est une assise saine et
solide, d’autres villes l’ont montré. La lumière est stable pour le reste, car
elle permet de satisfaire un peu toutes les demandes, car elle est le symbole
de la grandeur de l’image que l’on veut bien montrer. Mais aussi, la population
est informée et écoutée, par le bulletin municipal et par les réunions de
quartier : elle doit donc comprendre la cohérence du projet, non
Bordeaux n’est certes pas inventive
ou innovante en la matière, car elle tend à suivre la tendance, mais par contre
on peut imaginer qu’il s’agit pour elle d’une véritable révolution culturelle.
Cette politique est symbolique car elle apporte quelque chose de nouveau à la
ville, tout en utilisant l’existant que l’on cherche à remettre en valeur :
tout est une question d’image, une révélation. Peut-être que cela va faire
connaître Bordeaux pour autre chose que le vin. Et toute la symbolique est bien
dans ce qui est de la lumière[19].
Bordeaux n’a pas besoin de recherche d’identité, mais bien de valoriser la
ville, et par là même ce à quoi tiennent les habitants.
Les réalisations sont donc synonyme de dynamisme, de grande culture, permettent de valoriser ses propres atouts, ses équipements, le patrimoine architectural mais aussi de porter un message de dynamisme annonçant les réalisations futures, avec le relais espéré favorable des media locaux (Sud-Ouest ou France 3 Aquitaine). Ce n’est que l’un des éléments dans lequel Bordeaux s’investit, mais peut-être l’un de ceux qui se voit le mieux.
Ainsi, un article du Monde
publié le 13 juin 1998 “ Bordeaux, les
premiers signes de réveil de la ‘belle endormie’ ”, indique qu’“ après le règne anesthésiant de
Jacques Chaban-Delmas, Alain Juppé a engagé, avec succès, la rénovation de la capitale
d’Aquitaine ” même si les relations entre l’ancien Premier ministre et
les Bordelais ont été distantes. Le président de la chambre de commerce et
d’industrie indique que financièrement le nouveau maire “ s’est privé de marge de manœuvre pour marquer une rupture ou un
changement ” même s’il constate que ceci peut être une erreur. Le
maire reconnaît que “ le temps de
l’urbanisme est un temps très long ”, alors que son adjoint aux
relations avec les collectivités territoriales se félicite d’une “ politique de proximité ”
pour réveiller la “ belle
endormie ”. C’est ainsi qu’avant le début des grandes réalisations,
des réalisations comme le plan lumière sont indéniablement contributives à la
réalisation de ces objectifs envisagés. Car par ailleurs, l’article informe
d’une véritable politique au niveau de la sécurité et de la propreté, nous
précisant que toutefois “ l’indice
de satisfaction le plus fort, y compris parmi l’opposition, concerne assurément
la réhabilitation du patrimoine architectural via une opération de ravalement
systématique des façades, doublée d’un plan lumière ” : ainsi Bordeaux
“ retrouve la fierté de ses sublimes
alignements (...), de ses places redevenues magiques où les terrasses débordent
allègrement. On dirait, enfin, le Sud ”. Ceci consacre donc
véritablement la politique du maire dans ce domaine, d’autant plus que Gilles
Savary, président du groupe socialiste au conseil municipal, met à l’actif du
maire le plan lumière et la mise en valeur du patrimoine architectural.
Le maire veut donc avant tout
montrer la volonté de changement, par un projet prioritaire et un choix calculé
d’opérations pour des paysages urbains nouveaux. Par exemple, l’urbanisation de
la rive droite s’étalant sur de nombreuses années, la mise en lumière de la
Bastide devra être alors d’autant plus saisissante que l’arrière-plan sera
pendant longtemps sombre et peu lisible. Ainsi est-il proposé un rôle
pédagogique de préfiguration de l’urbanisme du site, en simulant virtuellement
un décor nocturne symbole d’une animation et d’un développement économique à
venir, à défaut de pouvoir effectuer une réalisation concrète et rapide.
Outre le réaménagement de nombreuses
places qui sont une richesse du patrimoine architectural bordelais, il semble
que le Plan lumière soit une véritable priorité pour le maire, toujours est-il
qu’il y est véritablement attaché, mais en tout cas il peut permettre de
souligner les traits de la ville de demain également fidèle à la richesse de
son passé : ainsi peut-on outre apporter plus de sécurité, redécouvrir la
ville, permettre de revitaliser et de valoriser des quartiers un peu oubliés, magnifier
la nuit par des mises en valeur d’édifices ou de monuments remarquables.
Avoir une ville plus belle et plus
sûre, voilà qui peut être un signe fort de la politique de la ville, si
toutefois ceci se fait à la hauteur du projet urbain.
Mais avant même le déploiement du
Plan lumière, avant même la révision de l’éclairage dans son ancienne version
des bâtiments principaux de la ville, les premières réalisations à la genèse du
Plan lumière sont la mise en lumière de la Place de la Bourse, l’un des lieux
parmi les plus prestigieux de la ville, ainsi que de l’église Sainte-Marie du
quartier de la Bastide sur la rive droite de
Tout d’abord, la Place de la Bourse,
joyau touristique de Bordeaux, a indiqué probablement une magnificence à
retrouver dans le cadre du passé et tout en préparant l’avenir, et permettant
d’annoncer symboliquement le réveil de la ville de Bordeaux. La Place de la
Bourse est en effet située sur les quais de la Garonne, dans la zone du secteur
sauvegardé, donc la réalisation de l’opération a nécessité la contribution de
l’architecte des Bâtiments de France, assez contraignante, ce qui témoigne de
la motivation pour son illumination, complétée par un ravalement achevé en
1999. Mais le fait qu’elle appartienne à la Chambre de Commerce et d’Industrie
a pu créer un certain avantage, et même un certain symbole.
D’autre part, la mise en place de
l’éclairage de l’église Sainte-Marie de la Bastide a pu être beaucoup plus
facile en mettre en place du fait qu’elle n’appartient pas au secteur
sauvegardé, est non-classée, et donc ne nécessite pas un appel de l’architecte
des Bâtiments de France, surtout qu’elle n’est pas un bâtiment d’une
architecture remarquable, mais la réalisation permet de donner aux Bastidiens
un sentiment d’écoute de la part de la nouvelle municipalité. Egalement, à
défaut de permettre d’opérer un rééquilibrage entre la rive gauche et la rive
droite de la Garonne, cette mise en lumière permet d’être l’identification
remarquable du quartier de la Bastide, séparé par la masse imposante du fleuve
du reste de
Puis les réalisations des Chartrons,
de l’église Saint-Michel et de la Bastide (avec l’église Sainte-Marie et la
gare d’Orléans) qui se sont faites dans la continuité ne sont pas innocentes
quant à leur choix car il s’agit de trois points hauts au dessus de la Garonne,
la population étant informée régulièrement des réalisations, notamment par voie
de presse ou par l’intermédiaire du bulletin municipal et ne saurait donc
échapper à la publicité faite par le Plan lumière et autour de lui.
Ont suivi en 1997 le Pont de Pierre,
la flèche da
De plus, les bâtiments anciens
désormais mis en lumière comme
Progressivement, les mises en
lumière permettront à l’avance de pouvoir dessiner ce que sera le projet
urbain, axé selon le cours de la Garonne au travers des quartiers Bacalan,
Bastide et Belcier, mais aussi selon un axe Est-Ouest développé dans le Projet
urbain. Illuminer les bassins à flots et la base sous marine, achever la
destruction de la Cité lumineuse permettent d’effectuer dans le paysage
nocturne un fil conducteur des quartiers nord vers le centre, et non plus une
rupture, synonyme d’abandon. L’on réalise symboliquement ce que l’on voudrait
voir comme réalité.
Ainsi, il est possible de se
demander si la réalisation du Plan lumière est envisageable, au même titre que
la campagne de ravalement par exemple, comme étant un effet d’annonce au projet
urbain. Un article publié dans le journal La Tribune le 29 novembre
1995, soit six mois environ après la prises des fonctions de la nouvelle
municipalité, et dont le titre est “ La
ville d’Alain Juppé attend un effet mobilisateur ”, nous précise qu’ “ à côté [des] opérations lourdes qui
tardent, l’illumination de la place de la Bourse, de l’église Sainte-Marie et
de l’Hôtel de la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB) pour la fin de l’année
(...) ne sauraient combler les retards accumulés ”. Si leur utilité
n’est pas de rattraper un retard, leur fonction hautement symbolique semble ici
être mise clairement en évidence par un lieu emblématique et ancien, un édifice
secondaire dans un quartier, la Bastide, qui demande à être réhabilité, ainsi
qu’un bâtiment moderne du quartier Mériadeck. Mais l’évolution du Plan lumière
a pu toutefois contribuer au fait qu’il s’agit d’un véritable programme intégré
dans le cadre du Projet urbain, non un appendice fait de petites mesures
secondaires destinées çà ou là à procurer une satisfaction partielle.
Mais si le projet a les faveurs et
la priorité du maire, peut-être est-ce bien car il permet aux habitants de
patienter : éclairer les bassins à flot et la base sous marine comme un lien
entre Bacalan et le centre-ville avant de réaliser concrètement le Projet
urbain, traiter Saint-Michel et Caudéran pour reconsidérer ces quartiers avant
la mise en place d’un programme à la perspective du quartier et de la ville,
éclairer le Pont de Pierre outre la symbolique de l’édifice pour donner un
signal aux Bastidiens d’être bien reliés au reste de la ville, en plus de
l’église Sainte-Marie ou aussi en revalorisant les quais. La nuit serait donc
comme un élément permettant de percevoir la ville de façon nouvelle, au travers
de jeux d’ombre et d’éléments singuliers permettant de rendre plus perceptible
à certains endroits les réalisations futures de façon symbolique. Il y aurait
des territoires, des lieux, des points de vue attractifs: ainsi on esquisse les
itinéraires les plus intéressants de
Il existe ainsi de façon évidente un
grand aspect politique, car l’investissement est loin d’être innocent : la
lumière ne peut pas résoudre tout, mais quelque chose semble se détacher avec
elle, même si ce quelque chose n’est pas toujours concrètement réalisé.
Certes
la mise en valeur représente un certain coût mais l’on peut en imaginer
l’impact du moment que l’évolution est contrôlée : en effet les premiers effets
du Plan lumière semblent attester de certaines évolutions, notamment au niveau
de la communication comme révélant la nouvelle ambiance ainsi mise en place.
Le patrimoine fait partie d’une
dimension symbolique car sa réhabilitation notamment par la lumière, et
accompagnée d’autres mesures, permet de gagner la sympathie de la population
pour ce qui est de la ville que l’on imagine redécouverte, par la volonté de
mettre en place une politique de proximité car touchant la majorité des
quartiers et des habitants de la ville au travers des réalisations ainsi
choisies, permettant de faire patienter la population et de lui donner à voir
les réalisations futures.
Cette
véritable “ opération séduction ” vise également à permettre
symboliquement à Bordeaux de repartir sur une nouvelle image, sur de nouvelles
bases permettant de tenter de reconquérir un certain prestige, mais aussi de
permettre d’utiliser un nouvel outil d’intervention culturelle à l’échelle de
la ville, culture et patrimoine étant des notions extrêmement liées.
La lumière ne doit pas avoir des
conséquences uniquement culturelles, mais aussi sociales, selon M. Dulout, car
en effet elle peut permettre de revitaliser certaines zones sensibles, elle
permet de créer une cohérence pour fédérer, resserrer les quartiers, outre
l’aspect sécuritaire. Car la lumière peut être vue comme un symbole de la
présence de la municipalité dans le quotidien, notamment dans le refus
d’accepter un certain laisser-aller. N’y voit-on pas là une mesure symbolique
de la lumière, qui à elle seule ne peut pas être capable de faire ceci ? Il
s’agit donc d’un élément annonciateur de ce qui va être opéré par
La notion politique est ainsi
affirmée dès le départ : les élus veulent ainsi maîtriser les
interventions pour que les électeurs aillent dans le même sens. L’élu a les
moyens directs de faire avancer les choses, la communauté devant négocier.
Ainsi, progressivement Bordeaux pourra reconquérir une certaine dimension
qu’elle cherche toujours à démontrer. Bordeaux dispose maintenant d’une bonne
image, ce qui contraste avec le retard passé pour ce qui est de la place de la
lumière dans
Ainsi, le déploiement du Plan
lumière permettra de pouvoir donner à voir, d’être une démonstration concrète
d’un changement qui s’opère à la lumière des réalisations : Bordeaux peut ainsi
rentrer dans son temps, mais aussi cela passe par des inaugurations ou des
nouvelles réalisations comme indicateurs de la volonté politique. Les
réalisations peuvent être utilisées comme un outil de communication, traduisant
une nouvelle image tant auprès des media que de la population ou des visiteurs,
et favorisant une certaine publicité car il s’agit d’un moyen supplémentaire de
pouvoir faire parler de la ville sans qu’il y ait un coût très important : il
existe donc un effet de publicité gratuite, la ville se voulant dynamique, les
entreprises se référant à cette image pour pouvoir s’installer car cela montre
qu’elles aussi sont dynamiques, encore faut-il en évaluer l’impact. Des cartes
postales, des dépliants, des festivals, sont autant de moyens pour assurer la
promotion de Bordeaux. Ainsi peut-on dévoiler ses atouts, limiter les critiques
à propos du manque d’éclairage, parler de la ville en tout cas de façon
positive et de supprimer l’impression d’inertie que pourrait créer le temps
séparant la mise en place des grosses infrastructures ou le passé.
Et ceci serait d’autant plus porteur
d’une image dynamique que le lien serait fort avec des événements permettant de
donner une identité remarquable, et permettant de réellement animer la ville
autour des réalisations, et quitter cette embarrassante image de ville austère:
les coupes du monde de football et de rugby, les festivités de l’an 2000 mais
aussi la fête du fleuve, du vin, ou des inaugurations ponctuelles sont autant
de points d’ancrage permettant de renouveler une certaine vie nocturne à
Bordeaux et d’inciter par là même à découvrir les réalisations effectuées, en
quelque sorte de pratiquer la ville aussi de nuit. L’on renouerait ainsi le
lien entre les notions de lieu public et de rassemblement traditionnel. Par exemple,
à l’occasion des journées du patrimoine, des programmes de “ nuits du patrimoine ” ont aussi été mis en place à
Bordeaux, la ville rejoignant ainsi le groupe de villes ayant elles aussi mis
en place des programmes de mise en lumière de monuments. Ainsi l’association
Renaissance des cités d’Europe a choisi d’organiser de nuit une visite du
quartier des Chartrons en cours de rénovation, notamment au niveau du
ravalement des façades et du programme de réaménagement des quais, afin de
redécouvrir les richesses qui ont fait l’histoire du quartier, mais aussi la
découverte des résultats de la politique de ravalement des quais ainsi que de
la mise en lumière de l’église Saint-Louis des Chartrons[20].
Des témoignages favorables à la restructuration du quartier ont été recueillis,
montrant ainsi la satisfaction vis-à-vis des projets réalisés.
Egalement, les mises en lumière sont l’occasion de mettre en place des inaugurations, qui sont toujours un bon vecteur de promotion de la politique de mise en lumière, avec le relais par la presse locale. Ainsi en a-t-il été par exemple du Grand Théâtre ou encore de la colonne des Girondins.
Mais aussi les festivités de l’an
2000 ont été l’occasion de mettre en place un éclairage spécifique pour les
cinq portes de la ville symbolisant aussi celles de l’entrée vers un nouveau
millénaire, avec le concours d’étudiants des Beaux-Arts. “ Les cinq portes ne sont plus seulement des éléments du décor
urbain ; dans la perspective de l’an 2000, elles deviennent un symbole de
passage et, à ce titre, actrices de la nuit ” : voilà ce qui a été
présenté dans le journal Sud-Ouest les 21 et 24 décembre 1999,
présentant les thèmes des cinq illuminations.
Ainsi donc, comme le dit Denis
Mollat, “ Ces fêtes sont des
symboles. On pensait que les Bordelais ne savaient pas s’amuser! ”[21].
Et ceci suffit pour faire comprendre ce qui fait l’intérêt de ses fêtes, devant
le panorama d’une ville enfin éclairée, donc enfin revisitée et redécouverte.
Cette création d’une ambiance
nocturne promue permet de donner un cadre nouveau à la ville, un cadre
agréable. Les Français aspirent en effet à une nouvelle conception de l’univers
urbain, avec une meilleure qualité de vie avec des avantages pour les piétons,
les vélos ou encore les rollers au détriment de la voiture[22].
Mais aussi les citadins de notre pays souhaitent en priorité améliorer la
sécurité (41%), avant de développer les animations culturelles, sportives les
fêtes dans le centre-ville (33%) et dans les différents quartiers (27%)10.
Or c’est précisément la contribution de la lumière que de mettre en pratique
tout ceci. Toutefois, cela ne doit pas se faire au détriment d’autres
revendications, car les citadins aspirent à la présence de commerces de
proximité. A noter qu’une minorité d’un quart souhaite conserver la place vouée
à la voiture, et donc une grosse majorité des personnes aspire à une
amélioration de l’environnement : la qualité de vie citadine prend d’ailleurs
le pas sur le confort individuel.
Mais un sondage effectué par
l’Association des grandes enseignes des rues piétonnières de Bordeaux[23],
et révèle les indicateurs qui peuvent inciter les populations à fréquenter le
centre-ville: outre la diversité des commerçants (78%) et les loisirs (39,3%),
l’ambiance (23,7%) et le cadre agréable (17,3%) sont des critères assez
fréquemment cités. Or le Plan lumière contribue à la réalisation de ces
critères: il peut à ce titre être considéré comme une opération séduction pour
les Bordelais et pour les autres. D’ailleurs, par exemple les jeunes ne
s’y trompent pas, redécouvrant les quais
ou la place de la Victoire pour les soirées estudiantines.
Ceci peut être interprété par le
fait que l’intérêt des populations ces dernières années porte sur la
réhabilitation du patrimoine ainsi que sur un certain engouement pour les
manifestations festivalières. Retracer l’histoire, notamment dans un cadre
dynamique n’est jamais neutre, car cela permet de fédérer la population ou
encore de la faire reconnaître à l’extérieur. L’anthropologue Issac Chiva[24]
reconnaît que “ C’est maintenant que
l’on voit les effets de la décentralisation (…) Ce retour au local, au passé,
au symbolique, est quelque close d’aussi novateur que le tourisme. Le politique
symbolique a toujours été incarné par Paris. Désormais, c’est la culture, donc
aussi l’histoire, qui est devenue un enjeu politique, social et économique.
L’histoire (...) satisfait le besoin de donner de la visibilité, de dire que l’on
fait quelque chose ”. Utiliser le passé pour préparer le futur, le
politique symbolique, voilà bien ce qui est promu avec le Plan lumière. Aller à
la quête des origines pour fédérer la population, faciliter l’intégration
sociale et renforcer la cohésion identitaire, ceci est ainsi réalisé de manière
plus rapide qu’avec la mise en place des grosses réalisations.
Or Bordeaux est une ville avec un patrimoine très important, avec l’un des plus grands secteurs sauvegardés de France, existant depuis 1962. Certaines contraintes impliquent des réhabilitations. Mais il existe un protocole patrimoine symbolique, électoral car il fait plaisir et donne de l’importance, il accompagne les autres actions voire les rend plus évidentes, et permet de révéler des choses.
L’intérêt est donc incontestablement
de faire plaisir à tout le monde, tant aux touristes qu’aux habitants, c’est à
dire au tout public. Mais l’article du Monde du 6 juillet 1999, “ Alain Juppé veut réussir à Bordeaux
pour oublier Paris ” montre toutefois que le maire “ est revenu avec ostentation et fait une politique très
populiste en prévision des prochaines municipales ”, pour reprendre
les propos de Gilles Savary. De plus l’on parle de “ gestion paillettes ”, sans critiquer le bien-fondé de
cette politique.
Le Plan lumière est un symbole
esthétique, social, lié à la vie de tous les jours. Un bâtiment bien éclairé
apporte de la sécurité en plus de son esthétique car il est mis en valeur,
entretenu, non abandonné ou mis à l’oubli. Parallèlement, une politique
d’embellissement et de lutte contre les dégradations peut permettre d’amplifier
encore plus ceci. L’intérêt est de donner une impression de donner une nuit
plus sûre, notamment dans les lieux de vie, cadres des sorties étudiantes
notamment. Les habitants sont de plus très heureux de voir le bâtiment de leur
quartier mis en valeur (comme la maison cantonale par exemple, ou encore la
cité jardin Claveau). Mais la ville est un ensemble de quartiers également :
ici entre en compte toutefois une autre considération.
Ainsi, la cohérence prend forme et
permet donc de donner à voir les réalisations futures : la redécouverte de la
ville se fait donc de façon très progressive. La nouvelle image semble donc
réconcilier les habitants avec leur ville : le Plan lumière participe à ceci
avec les autres politiques liées au. Et ceci est d’autant plus accru qu’il
existe les animations mises en place permettent de “ pratiquer ” la
ville, qui cherche à retrouver son rang de grande ville française, et même
européenne.
Dès 1996, Bordeaux a lancé son vaste
programme patrimonial dans l’objectif de favoriser le rayonnement de la ville
et de faire de Bordeaux une ville de référence en matière de mise en valeur et
de respect du patrimoine dans un contexte de développement de Projet urbain.
Ceci s’est fait par le ravalement de la façade des quais, mais aussi par la
mise en œuvre du Plan lumière comme témoignage symbolique des vastes chantiers
qui s’annoncent.
Mais trois ans plus tard, la
reconnaissance de l’entreprise dans laquelle s’est investie Bordeaux semble
avoir été faite. La consécration a été l’accueil du colloque “ Patrimoine
et lumière ” les 8 et 9 septembre 1999 au “ capcMusée ”, avec
des rencontres sur “ la lumière et le sensible ”, “ l’homme
scénographe de ses nuits ” ou encore “ les lumières au service de la
ville ” auxquelles ont participé des philosophes, des architectes, le
concepteur lumière Roger Narboni, des réalisateurs de mises en lumière, la
déléguée régionale EDF ou encore des designers, mais aussi avec des visites de
sites bordelais ayant fait l’objet de mises en lumière. Ce colloque est
organisée par l’association Renaissance des cités d’Europe qui anime aussi les
nuits du patrimoine. nous révèlent que Durant ce colloque des réserves ont été
émises[25],
notamment par M. Narboni, quant au risque de voir un excès d’illuminations qui
pourrait entraîner “ une
banalisation et une perte d’émotion ”, ajoutant que “ nous sommes les champions du monde des illuminations ”.
Pour lui, il faut trouver “ la
troisième voie entre l’illumination paquet cadeau et l’œuvre d’art déconnectée
de la réalité ”. Car il faut bien être conscient qu’un tel outil est
sûrement limité et souffre de certaines faiblesses. Toutefois, Bordeaux n’a pas
risqué une illumination trop rapide en se donnant vingt mois de réflexion, et
cela avec un budget raisonnable. Et enfin il a rajouté que pour lui l’éclairage
peut permettre de très nombreuses retombées, non seulement au niveau symbolique
et patrimonial comme nous l’avons vu, mais aussi comme en étant une véritable
politique annexe: certes le Plan lumière permet d’apporter aux décideurs
publics, mais aussi au-delà à la ville.
L’élaboration du Plan lumière s’inscrit avant tout dans la politique générale de la ville de Bordeaux en matière d’urbanisme, dont les grandes lignes consistent à développer son dynamisme en réorganisant les quartiers en difficulté, en revitalisant son centre, en réaménageant ses deux rives pour les rendre plus accessibles et plus conviviales, mais aussi pour mettre en valeur le patrimoine architectural et urbain. En effet, le SDAL tient avant tout compte du Projet urbain. La volonté est de mettre en œuvre une stratégie nocturne globale pour développer dans la ville un éclairage urbain de qualité et une image nocturne novatrice et attractive à la hauteur des ambitions affichées. L’on cherche donc à dépasser l’évident aspect symbolique.
Car si le Plan lumière semble être
comme un “ artefact ” déclencheur d’une prise de conscience de la
part des citoyens du changement opéré ou plutôt de la volonté de changement
qu’opère la nouvelle municipalité, il est vraisemblable qu’il serve d’appui aux
autres grandes mesures du Projet urbain (Bacalan-Bastide-Belcier, le
franchissement du fleuve, l’aménagement des quais rive gauche,…), et préfigure
ainsi une nouvelle conception de
Il convient de préciser que
l’ambition opérée par l’étude de la mise en place du Plan lumière était de
permettre de redécouvrir les lieux de vie ainsi que de structurer et
hiérarchiser la ville (en créant une armature urbaine) en plus du motif de
sécurité. Il existe donc des aspects patrimoniaux, identitaires, et nécessaires
pour dégager des potentiels revendiqués par un attachement de plus en plus
important à l’aspect nocturne.
Ainsi il est considéré comme un
projet de long terme dans le cadre de lisibilité et de re-dimensionnement de la
ville car il est l’un des éléments nécessaires dans des projets de
réhabilitation mais aussi car il permet de prolonger la conception du Projet
urbain dans une perspective de nuit, ce qui offre ainsi de nouvelles
possibilités.
A l’intérieur du Projet urbain, le
Plan lumière est une des actions d’incitation, rapide car réalisable sur un
temps court. L’on réserve des crédits, et l’on effectue des réalisations selon
un calendrier envisagé, et au bout de cinq ans le projet prendra toute sa
cohérence : ceci laisse plus de temps pour préparer les autres dossiers, nous
l’avons vu, mais aussi les mises en lumière de bâtiments ou de voies
accompagnent les autres actions. Car si le Plan lumière est le moyen le plus
simple pour donner à comprendre la ville de demain envisagée dans le Projet
urbain, préfigurant et donnant à voir, il est comme une grille de lecture : il
est plus général, et s’intègre naturellement dans les autres projets.
Ainsi, pour ce qui est de la
réorganisation des quartiers en difficulté, on peut prendre l’exemple du
quartier Saint-Michel[26],
où une OPAH (opération d’amélioration de l’habitat) a été mise en place, afin
de limiter un taux de vacance des logements devenu trop fort, créant ainsi un
déséquilibre de population, ainsi qu’une surpopulation étudiante. Ainsi
envisage-t-on des actions structurantes pour re-dynamiser le quartier urbain.
Outre la réalisation de réhabilitation des logements qui se mettent en place,
des ravalements de façades ainsi que le Plan lumière peuvent permettre de
donner une autre allure au quartier, repéré et identifié par
Le projet urbain accorde une place
importante à l’environnement et à la qualité de la vie urbaine. Mais outre le
développement de la ville qui doit se faire autour du fleuve, la
requalification du quartier Saint-Michel et la restructuration des Capucins
doit aussi s’opérer. Et dans l’ensemble des divers projets de développement du
quartier est prise ne compte la mise en valeur de monuments religieux et de
sites pittoresques, notamment par des mises en lumière, ou des ravalements,
mais aussi la requalification de nombreuses voies. Un problème d’espaces
publics dévalorisés handicape entre autres le quartier, mais il joue de
potentialités qu’il s’agit de développer, de par sa vitalité ou sa jeunesse.
C’est le but de ces politiques : le fait de faire fréquenter le quartier par
des populations non-résidentes peut contribuer à son développement.
Mais d’autre part, la politique de
réhabilitation du quartier Saint-Eloi[27],
déshérité au regard de la fermeture de nombreux commerces, est très
intéressante dans cet aspect de réhabilitation en vue d’une ré-appropriation du
quartier. Pour redonner une identité à
Il n’y a pas qu’un élément de
curiosité, mais un niveau social faisant en sorte que les gens puissent
redécouvrir leur ville par
Mais aussi, une grande importance
est accordée aux grandes structurantes, aux agrafes, aux entrées de ville,
ainsi qu’à l’aspect patrimonial (pour les principaux bâtiments et les sites
classés). Dans la trame que dessineront les voies éclairées on voudra mettre en
place un élément d’interconnexion, une liaison dont l’élément nocturne se fera
par la lumière : il s’agit du parcours patrimonial, dont la logique est
semblable à celle d’une promenade proposée au travers de certains lieux choisis
du patrimoine bordelais afin de redécouvrir la ville, au-delà du secteur piéton
: ceci va de pair avec la diminution de la place de la voiture dans la ville,
et pourra permettre de redécouvrir la ville d’hier à demain au travers des
différentes périodes, dans ses différentes identités, et donc d’en découvrir une
autre dimension nocturne.
Egalement, l’arrivée du tramway pourra donc permettre de revaloriser la “ pratique ” de la ville par les piétons mais aussi par les cyclistes, et poursuivre un peu plus le changement d’image dans la compétition avec les autres villes la qualité de vie est sûrement améliorée, et la ré-appropriation tout comme la découverte notamment nocturne favorisée. Le centre va donc être peu à peu réinvesti, les obstacles gênant sa fréquentation comme les problèmes liés à l’automobile s’étant atténués, pour peu que des commerces et des activités diverses y prennent place et y soient maintenus. La lumière est donc l’un des éléments de la convivialité.
Ainsi, l’action va de pair avec
d’autres politiques liées à la réhabilitation du patrimoine, à
l’embellissement, mais aussi dans le cadre d’autres mesures, afin de permettre
de “ penser ” la ville non seulement le jour, mais aussi la nuit.
Le Plan lumière fait véritablement
partie du Projet urbain, il n’est pas un appendice. Et il s’agit même de l’un
des axes forts de cette politique de la ville car il annonce le plus. En effet,
comme me l’a précisé M. Crombé, il existe deux axes de développement: un axe
nord - sud-est (représenté notamment par le tramway dont le parcours se
superpose avec les lignes de force présentées par le Projet urbain et
soulignées par le Plan lumière ), ainsi qu’un axe nord-sud représenté par la
Garonne que l’on cherche à franchir.
L’idée forte est que la ville existe
la nuit et est appréhendée de façon différente, car elle se lit et commence à
s’apprécier
A Bordeaux l’on essaye de redonner
un fil conducteur, et d’envisager de la diversité dans
Le Plan lumière n’est donc pas
limité à une zone centrale de la ville, et offrent donc la possibilité de
mettre en valeur d’autres quartiers. Ainsi les mises en lumière
pourraient-elles permettre de redécouvrir la cité jardin Claveau, dont la mise
en lumière a été faite très étroitement en relation avec
Pour ce qui est des quais, ayant un
aspect identitaire pour Bordeaux, il s’agit d’un grand enjeu pour demain.
Occupés jadis par l’activité portuaire, en mauvais état, aujourd’hui occupés
par la circulation automobile, la reconversion de ces quais est en cours. Ils
seront aménagés avec la création de promenades que l’on veut valoriser par
l’éclairage nocturne, la création d’un pôle d’activités diverses (le salon du
livre, la fête du fleuve,...) mais aussi une vue panoramique depuis l’autre
rive, dégagée des bâtiments des anciennes activités portuaires, peut permettre
de revitaliser
L’éclairage public est ainsi un élément très précoce mais un élément comme les autres dessinant la ville de nuit. L’occasion de repenser ainsi la ville est indéniablement la marque de grands décideurs, pour une meilleure qualité de vie. La participation à un re-dimensionnement et à une nouvelle lisibilité de la ville se fait donc avec l’appui des autre éléments du Projet urbain, dans le but d’une plus grande attention vis-à-vis des quartiers périphériques, mais aussi par rapport à d’autres dimensions liées à la qualité de vie, à la sécurité, à la redécouverte de la Garonne, ou au retour d’une certaine population vers le centre-ville. Mais aussi le Plan lumière dispose d’une certaine autonomie dans le Projet urbain. Il est donc incontestablement comme un “ plus ” dont on ne saurait se passer.
On tente donc aussi d’appuyer les
politiques qui évitent les déplacements de lieu de résidence en fonction du
revenu, ainsi que l’étalement. La reconquête des centres est aujourd’hui un
enjeu important de la politique de
Si l’arrivée du tramway pourra faire
incontestablement de Bordeaux une ville plus pratique, le Plan lumière fait
partie de ces mesures qui contribuent à l’embellissement de la ville, avec les
espaces verts par exemple, lui assurant un certain standing comme les
réalisations se font en accord avec les autres services concernés par les aménagements
de voirie.
Ainsi ceci pourra permettre une
certaine qualité de vie, et cela passe par un accroissement du nombre de rues
piétonnes, des places, par la rénovation urbaine, par la mise en valeur du
patrimoine. Mais nous allons nous intéresser à ce que la qualité de vie, le
prestige, peuvent apporter à
Avec le tourisme, l’on rejoint un
aspect économique, par la valorisation de ses atouts, le dynamisme, la culture,
valorisant les équipements intéressants. Ainsi, quand l’image est bonne,
l’expression est bonne car l’on montre outre que l’on peut rivaliser avec
d’autres agglomérations importantes par la valorisation de ses propres atouts.
C’est par l’ambiance festive qu’il crée, qu’un bel éclairage dans les rues est
un acteur de promotion du tourisme et bien sûr du commerce local. C’est donc à
long terme et par d’autres mesures que le simple fait d’éclairer qu’il semble
que les mises en lumière peuvent montrer que l’aspect embellissement de ses
propres atouts peut être utilisé au niveau économique. Car comme Bordeaux est
une ville de référence en Europe pour la richesse et l’unité de son
architecture classique et néoclassique des XVIIIe et XIXe
siècles, le développement touristique est justifié à ce titre.
L’Office du Tourisme est présidée
par le premier adjoint au maire, et a une délégation de la ville pour la
gestion de la politique touristique de la ville, l’action se faisant de façon
concertée, et a donc la possibilité de jouer sur cet élément pour favoriser
certains éléments.
Ainsi, l’activité touristique est
assez importante à Bordeaux : en août en moyenne 3000 touristes visitent
quotidiennement
En effet, l’année 1980 était
consacrée au patrimoine : une sensibilité s’est créée, avec les classements de
monuments historiques, et avec cela de la notion de patrimoine. Et l’intérêt
pour le patrimoine est allé croissant avec les journées qui lui sont consacrées
et qui connaissent un franc succès. Ainsi, ce dernier doit être entretenu, et
ceci sera d’autant plus légitime qu’il y aura une reconnaissance
“ officialisée ” effectuée par des mises en lumière, insérée dans un
cadre institutionnel, dans la communication de
Ainsi cette préoccupation de
l’esthétique remonte aux années 1980 en même temps que l’intérêt pour le
tourisme patrimonial. L’impact se fera donc au moyen d’outils de communication
et de circuits lumière basés autour des mises en lumière, ou par le parcours
patrimonial, qui permet d’établir une vision transversale faisant remonter les
époques : il y a donc des incitations pour aller plus loin dans l’exploitation
touristique, jusqu’à même faire redécouvrir la ville aux Bordelais. Il y a donc
un sentiment important, une estime qui se développe, vis à vis de la mémoire de
la ville, dont on cherche par ailleurs à réconcilier les différentes. Un
travail a donc été effectué sur l’amélioration du cadre de vie, sur la mise en
valeur du patrimoine de la ville plus particulièrement sur le secteur
sauvegardé, et ce afin de faire une découverte originale de la ville autour des
principaux monuments, avec une ambiance différente selon qu’il s’agisse du jour
ou de
Toutefois, les mises en lumière sont
également parfois rendues nécessaires. Par exemple, Bordeaux n’a pas de musée
du vin : l’on peut pallier à cela par la mise en place des évènements lumière
dans le cadre d’une découverte des éléments du patrimoine souvent privé qui
l’évoquent : la vision qui sera ainsi donnée ne sera perceptible que
Les
mises en lumière sont en effet nécessaires pour faire de Bordeaux une ville
touristique, mais il faut aussi créer des animations pour pouvoir mettre en
valeur. Ainsi en est-il de la Fête du fleuve à la suite de Vinexpo ou de la
fête du vin à l’issue de la coupe du monde. Il existe donc une certaine
alchimie à mettre en place, liée à l’image de dynamique.
Il s’agit aussi de
“ rebondir ” sur les évènements pour valoriser le patrimoine dans une
perspective touristique. Par exemple, le classement par l’UNESCO de tous les
sites liés au chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle fera mettre en valeur
Un touriste peu renseigné se
laissera guider par les animations nocturnes, ce qui lui permettre de faire une
lecture non seulement des lieux les plus importants, de voir un cadre dans la
lecture des différentes périodes historiques, mais aussi il pourra contempler
la silhouette nocturne de Bordeaux depuis la rive droite.
Ainsi, au départ, certes, ceci est
toujours symbolique mais au fond il y a autre chose. Bordeaux est une ville qui
a des possibilités en matière touristique. Si l’un des exemples les plus
remarquables est essentiellement le rayonnement du musée Guggenheim à Bilbao
permettant d’attirer vers la ville des personnes qui autrement n’avaient pas
lieu de l’être tant les friches industrielles sont nombreuses et inesthétiques,
Bordeaux dispose d’un patrimoine à valoriser fortement, issu de la richesse
héritée du vin ainsi que des diverses autres caractéristiques ayant fait de la
ville ce qu’elle est aujourd’hui dans le tourisme, qui est aussi une
caractéristique économique. Or ce tourisme vient d’une demande de vacances
culturelles. Et la nécessaire présence d’infrastructures destinées à accueillir
les touristes semble être une réponse à cette attente.
D’autre part, il s’avère que le
retour de grands bateaux tels le Queen
Elisabeth s’amarrant en face de la place de la Bourse détermine la vocation
qu’a Bordeaux pour restaurer la grandeur de ses monuments, mais aussi de sa
réputation, et ainsi restituer tout son prestige.[31]
Le patrimoine et son image peuvent
redonner une certaine importance et un certain intérêt extérieurs à la ville
aussi liée à l’aspect économique lié à l’investissement, ou à des choix plus ou
moins objectifs : une société dynamique va préférer une ville qui lui
ressemble afin d’optimiser ses atouts, c’est-à-dire en choisissant une ville
agréable, ce qui est rendu possible par la lumière[32],
ainsi que des éléments pour que les gens puissent sortir et soient encouragés à
le faire. Ainsi, les aménagements pourront profiter à la Bastide, qui pourra
avoir tous les atouts de son côté. Mais il semble nécessaire d’accompagner avec
des mesures incitatives, avec l’aide possible du service action économique. Et
les aménagements profiteront également à toute l’agglomération dans ce domaine,
ainsi même qu’à
L’on a donc cherché à restructurer
la ville afin qu’elle soit belle et liée à son patrimoine, c’est-à-dire donner
un signal fort et une bonne impression de l’image, en fonction des atouts
culturels et historiques, mais aussi fonctionnelle, ce qui prend beaucoup plus
de temps.
Si des entreprises automobiles ou aérospatiales se sont implantées, il faut en tout cas que Bordeaux puisse attirer les investisseurs afin de réduire le chômage, dont le taux est plus important que celui relevé au niveau national : or cela peut passer par des campagnes de promotion, notamment utilisées par l’image. Bordeaux est une métropole d’équilibre, une ville de rang international: la question de concurrence entre les villes est donc assez importante. Mais en tout cas, la grande ambition pour Bordeaux est d’être la grande ville du Sud Ouest, et donc la ville veut opérer une remise à niveau par rapport aux grandes rivales que peuvent être Toulouse ou Montpellier, et d’amorcer peut être même l’épanouissement de l’Arc Atlantique en renforçant sa position, dont l’image porteuse et l’accueil de nouveaux investisseurs sont un passage obligé
Or pour l’image il est question de
re-dynamiser le centre, lieu qui a l’identité la plus forte, car étant
historique. Des aménités pour reconquérir le centre, peuvent favoriser
l’implantation des entreprises. En effet, la vie culturelle est comme le
complément d’une activité économique. Bordeaux est une ville ancienne mais
aussi moderne, d’envergure européenne : voilà qui peut être un élément pour
aller dans le but recherché. Il s’agit de montrer, de désigner, de révéler
l’importance, de dissimuler peut-être certains retards mais en jouant sur ses
atouts: la lumière peut donc permettre de hiérarchiser, de donner à voir, et
donc elle permet une certaine latitude quant à l’image que l’on veut donner. Et
cette image semble être porteuse puisque Bordeaux accueille les sièges régionaux
de plusieurs grandes entreprises.
Le Plan lumière participe donc entre
autres à des fonctions destinées à l’aménagement du territoire (pour la Gare
d’Orléans, la réhabilitation ainsi que la mise en lumière de nuit la rendant
incontournable à permis l’installation d’un cinéma profitant à la rive droite),
du fait que l’on cherche à promouvoir l’installation de nouvelles activités
notamment, en plus de rééquilibrer la croissance urbaine.
En offrant des espaces accueillants,
un cadre de vie agréable, incontestablement l’on peut voir un retour de
population, par la renaissance de quartiers comme les Chartrons, la naissance
de quartiers comme la Bastide, ou la redécouverte de quartiers comme
Saint-Michel. Or nous avons vu que le Plan lumière a contribué à re dynamiser
ces quartiers.
Les conditions sont agréables aux
gens désireux de s’installer, d’autant plus que l’accompagnement d’équipements
collectifs de qualité (lycées, bibliothèques, commerces,…) est suffisant, ce
qui a un effet bénéfique. Ainsi
Les impacts de la lumière sont donc
multiples, symboliques au début mais efficaces par
La lumière est ainsi avant tout
considérable comme un élément d’un tout, dans le Projet urbain.
Mais aussi cette entreprise doit
être reliée avec l’importance de la médiatisation et du fait qu’il s’agisse de
l’un des dossiers prioritaires du maire, peut être aussi car les acteurs ont à
mes yeux pris plaisir à travailler sur ces dossiers, ce qui ne peut
qu’entraîner des conséquences favorables pour la réussite de l’entreprise. Au
fil des découvertes, un véritable engouement s’est créé. Peut-être que ce
“ dépoussiérage ” de Bordeaux, ce réveil de la ville, accompagné par
d’autres mesures patrimoniales destinées à redécouvrir le centre et à inciter
la population à revenir vers le centre, tout en limitant les voitures,
permettra de changer non seulement l’image de la ville pour ses habitants, mais
aussi avec la mise en place véritable du Projet urbain la pratique de
Si l’aspect symbolique est évident,
si l’utilisation participe aux autres dispositions du Projet urbain, l’on en
connaît le coût, mais les retombées ne sont pas quantifiables, tant pour le
tourisme, que pour les retombées d’installation, ou pour le développement de
l’image qui flatte la population et incite à un développement. Il faudrait peut
être également un accompagnement par d’autres villes de l’agglomération pour
assurer une certaine continuité, ce qui passerait par un transfert des
compétences en matière d’éclairage au profit de la communauté urbaine, d’autant
plus que Mérignac a également procédé à la mise en place de son Plan lumière.
Mais pour ce qui est de la réussite,
il faut aussi un accompagnement par une nouvelle pratique de la ville de la
part de
En effet, il ne faut pas que les
mesures soient seulement artificielles, symboliques : tout doit être repensé
dans la cohérence avec les autres éléments du Projet urbain pour que
l’évolution de Bordeaux soit la plus achevée possible, soit réelle et pas
seulement visible.
Ainsi, poursuivre cette politique de
mises en lumière tant des voies que des bâtiments est nécessaire, sans
toutefois aller jusqu’à l’excès tant des réalisations que du coût financier. La
reconduction du Plan lumière semble donc être nécessaire, mais toutefois le
processus est sans fin, du fait que le concept change avec les modes ou les
techniques, et que l’apparition de nouvelles normes européennes tend à
déstabiliser. Mais toutefois, il semble qu’elle se fera toujours avec la même
détermination, en tout cas jusqu’en 2001, date des prochaines élections
municipales et à laquelle les électeurs ne manqueront pas de constater les
avancées concrètes du Projet urbain de Bordeaux, à savoir pour ce qui les
touche le plus, autrement dit la valorisation du patrimoine.
Le retour de Bordeaux vers Bordeaux,
du passé dans le présent pour préparer l’avenir, voilà le grand enseignement du
Plan lumière.
ANNEXE I : Extraits du Projet urbain de la ville de Bordeaux.
ANNEXE II : “ Eclairage
public ”, extrait du Guide général de la voirie urbaine.
ANNEXE III : “ L’urbanisme lumière, une nouvelle dimension pour la ville ”, La lumière et la ville à la Défense, décembre 1991.
ANNEXE IV : - Introduction et
sommaire du Schéma directeur d’aménagement lumière de la ville de Bordeaux.
-
Quelques extraits du Schéma directeur d’aménagement lumière tels que publiés
dans l’article “ Bordeaux, ville des lumières ” de Génie Urbain,
novembre-décembre 1999, accompagnés de quelques croquis explicatifs.
ANNEXE V : Le calendrier des
réalisations effectuées dans le cadre du Plan lumière de la ville de Bordeaux.
ANNEXE VI : Quelques images de
réalisations, telles que présentées par Génie urbain, novembre-décembre
1999, ainsi que sous forme de cartes postales ou de photos.
ANNEXE VII : “ Une ville qui
doit réapprendre à s’aimer ” et “ Bordeaux en panne ”, articles
du Monde présentant Bordeaux avant l’arrivée d’Alain Juppé comme maire
en 1995.
ANNEXE
VIII :
- “ Bordeaux, les premiers signes du réveil de
- “ Bordeaux change de peau ”, Sud-Ouest
Dimanche du 11 octobre 1998
- “ Bordeaux rattrape le temps
perdu ”, Le Point du 21 janvier 2000.
Ces articles présentent Bordeaux et sa nouvelle image depuis l’arrivée d’Alain Juppé comme maire de la ville en 1995.
ANNEXE IX : - “ Patrimoine,
la ville des lumières ”, Le Point du 21 janvier 2000
-
“ Grand Théâtre, le chantier lumineux ”, Sud-Ouest du 7
décembre 1999
- “ L’an
2000 se porte bien ”, Sud-Ouest du 21 décembre 1999.
Ces articles présentent les réalisations du Plan lumière de la ville de Bordeaux.
ANNEXE X : “ Bordeaux en habit
de lumière ”, Bordeaux Tourisme, janvier-février 1999.
ANNEXE
XI :
“ Quand Bordeaux réveille la nuit ”, extrait de
- La lumière urbaine, éclairer les espaces
publics, Roger Narboni, Le Moniteur,
collection technique de conception, Paris, 1995
- La lumière depuis la nuit des temps,
ouvrage collectif, Autrement, 1991.
“ La lumière et la ville, nuits de ville,
lumière d’un temps ”, exposition réalisée par l’EPAD à la Défense sous le commissariat
général de Roger Narboni, Flammarion,
Paris, 1991.
- Les divers articles de journaux consacrés aux réalisations
du Plan lumière publiés par Sud-Ouest.
- Les divers articles publiés par les quotidiens et
hebdomadaires français consacrés à Bordeaux.
- Les diverses plaquettes et journaux d’information
de la mairie de Bordeaux et de l’office du tourisme.
- “ La lumière dans la ville ”, dossier de
Génie Urbain, novembre - décembre 1999.
- “ Bordeaux, un projet urbain global ”,
article publié par Le Moniteur des travaux publics et du bâtiment, 25
octobre 1996.
-
Le Projet urbain de Bordeaux, le schéma directeur d’aménagement
lumière, le Plan lumière et la Charte lumière de la ville.
Jérôme D
( courriel :
jejeduc chez caramail.com )
[1] cf. Rapport de stage DESS IEP Les compétences communautaires en matière d’urbanisme, Astrid Naboulet.
[2] Le
service de l’éclairage public est un service habituel des villes. A Bordeaux
plus spécifiquement a été rajoutée la fonction de mises en lumière,
correspondant à l’idée du maire de lancer le Plan lumière, par extension du
service mais sans modification de
[3] Des extraits du Projet urbain sont présentés en annexe.
[4] voir à ce titre les dispositions du Projet urbain.
[5] Voir à ce titre les annexes II et III présentant des caractéristiques de l’utilisation de la lumière dans la ville.
[6][6] cf. annexes.
[7] Nous reprenons ici les différents points développés par le document constituant la première partie du SDAL.
[8] Nous
reprenons ici les différentes informations que constitue la seconde partie du
SDAL, en épargnant toutefois le lecteur de certains aspects trop techniques.
Toutefois, une présentation en est faite dans
[9] Cette citation est issue de la présentation de Projet urbain par le maire.
[10] Une présentation de ce calendrier établi est faite en annexes.
[11] En effet, la basilique est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre de son emplacement sur le Chemin de Saint-Jacques de Compostelle.
[12] Les différents acteurs concernés m’ont précisé ceci, l’ordre des opérations obéissant à des règles précises.
[13] Les
concepteurs lumière sont tous des spécialistes de haut niveau. Il s’agit
essentiellement de personnes qui viennent du spectacle, du cinéma ou de la
musique, mais également ce sont des
ingénieurs, des artistes ou des architectes comme pour
[14] Pour ce qui est des fournitures, il existe un appel d’offre spécifique, sauf pour certaines réalisations où il s’agit de “ fourni posé ”, à cause d’une contrainte d’accessibilité.
[15] La réalisation des travaux rencontre parfois certaines difficultés, ce qui a été notamment le cas pour le Pont de pierre où les réalisations ont dû être reconsidérées, avec en plus certaines difficultés pour réaliser concrètement les travaux (des alpinistes professionnels ont par exemple été nécessaires pour effectuer la pose des sources de lumière du Pont de pierre).
[16] Le Point du 21 janvier 2000
[17] Diagonal, mai juin 1998
[18] Voir les annexes VII et VIII montrant le contraste entre les gestions de la ville par les deux maires.
[19] L’on parlait au XIXème siècle de Bilbao comme ville lumière, là où les investissements français et anglais s’installaient dans cette région. Ville la mieux éclairée, la capitale de la Biscaye représentait un symbole de puissance et de modernisme. Si aujourd’hui elle a perdu de son attrait, celui-ci a été récupéré par l’installation du musée Guggenheim, joyau symbolique du renouveau et de l’identité nouvelle de la ville, qui a voulu se démarquer de son passé industriel entré en déclin. Et le rebondissement a été un succès, d’autant plus que Bilbao était aussi un vieux port
[20] cf. article du journal Sud-Ouest du 20 septembre 1999 consacré à ce sujet dans les pages “ Bordeaux ”, présenté dans l’annexe IX..
[21] cf. article du Nouvel Observateur consacré à la ville de Bordeaux.
[22]cf. article du Monde du 23 juin 1999.
[23] Ce sondage a été publié par le journal Sud-Ouest Dimanche le 7 novembre 1999
[24] cf.article du Monde, du 30 octobre 1998 “ L’histoire locale, nouveau ciment de la vie collective ”
[25] cf. articles publiés par Sud-Ouest les 9 et 10 septembre 1999
[26] des renseignements plus précis sont présentés par une étude de l’agence d’urbanisme, “ Capucins, Saint-Michel : un marché à transformer, un quartier à requalifier ”.
[27] cf. le journal Sud-Ouest du 23 septembre 1999
[28] Cette réflexion est telle qu’affirmée par M. Dulout.
[29] Il
s’agit de l’architecte qui a gagné le concours de maîtrise d’œuvre
d’aménagement des quais de Bordeaux Rive Gauche de
[30] cf. Sud-Ouest du 8 septembre 1999.
[31] La plupart de ces renseignements m’ont été présentés par MM. Kamlay et Prévôt de l’office du tourisme de Bordeaux suite à un entretien. Egalement, voir les annexes X et XI consacrées à l’utilisation du Plan lumière comme élément touristique.
[32] A ce titre une plaquette a été destinée aux entrepreneurs afin de les inciter à s’installer dans l’agglomération bordelaise, “ Bordeaux, laissez-vous séduire ”.
[33] Un supplément immobilier publié par Sud-Ouest en mars 2000 en atteste clairement.
[34] cf. Sud-Ouest du 11/10/1998